C’est ça ouvrier,
Ça commence par le froid et la faim
Qui nous enserrent
Moi et les miens
C’est la misère qui tient les chaînes
Et me traîne
Aux portes de l’usine
Puis m’arrime
A la machine
Pour qu’une décadence m’avale,
Courbe mon échine
Sous un rythme infernal
La sécheresse
S’inscrit sur mon visage à rides
Mon teint ressemble à l’oubli
Et mes journées, à mes nuits
Lit vide.
Je rêve d’une vraie bouffée d’air
Mais l’œil désapprobateur
Du cadran qui comprime ma chair
Me pousse vers le labeur
D’un mouvement circulaire
Pâleur.
A moitié anesthésié
Je titube sous l’engrenage
Qui me broie à son gré
Pour huiler ses rouages
De ma sueur et mon sang
Sorti pour quelques heures
Avant d’y replonger,
Pris entre deux abîmes,
Je m’efforce de fuir au fond d’un verre ambré
Quitte à finir noyé
C’est ça
Ou vriller.
Janvier 2019