Vie Orageuse
A ma très chère sœur,Tu voulais savoir qu’était la différence entre vie et survie, tu voulais savoir ce que l’on ressentait, comment je faisais, comment si proche du ravin je ne me laissais pas tomber, tout simplement.
Alors voila je vais te le dire, rien que pour toi, pour ne pas que tu me suives, pour que, face à ce fléau que tu connaitra, tu puisse faire face, avec force et courage, connaissant ton ennemi.
On vit pour soi, on survie pour les autres.
C’est d’ailleurs pour ça, que quand l’orage se lève, que le ciel s’obscurcit, doucement, qu’un voile noir tombe sur nos yeux, enveloppe notre cœur, l’emprisonnant au milieu de sombres murs, ne le laissant plus voir l’amour que l’on nous porte, cela nous pousse à arrêter de nous battre, à arrêter de lutter face à cette vie qui paraît tout d’un cou si dur, si triste et si cruelle. Ce voile, cette maladie, ma maladie, ma sœur, s’appelle la dépression.
En mon âme se déchaine une tempête que personne d’autre que moi-même ne peut soupçonner, ne peut imaginer. La pluie tombe, la foudre frappe, le vent souffle balayant mes derniers souvenirs de bonheur en un instant, les emmenant au loin. Ils se brisent, comme des vagues sur des rochers. Et les lames de fonds, créées par cette mer déchaînée asseyent mon cœur, comme des couteaux que l’on enfoncerait dans ma chair, dans mon être, en mon âme.
J’ai du apprendre à vivre avec, j’y ais été contrainte, forcée. Comment empêcher la pluie de tomber ? Comme les prévisions météorologiques, où l’on voit l’anticyclone arriver, il y a des signes annonciateurs ; la perte d’appétit, la perte de ces petits moments de bonheur qui allègent le fardeau de la vie, de ces petites envies qui bien que futiles nous procurent une joie secrète. On voit tout cela et on sait. On sait que cela va arriver, inévitablement, sans que l’on ne puisse rien faire, impuissant. L’Impuissance. Ce mot m’a souvent fait enragé, a souvent provoqué la haine en mon cœur. Encore aujourd’hui je le maudis.
Mais ma sœur, tel que tu me connais, tu sais que je ne me laisse pas faire. Jamais. Même impuissante je me bas. Imagines-tu ? Si au lieu de se noyer sous ses propres larmes on apprenait à nager ? Si face à la foudre, on dansait, pour éviter de se faire toucher par un éclair chargé d’émotions trop forte, trop violentes pour être comprises, interprétés? Si face au vent qui veut nous emporter, on résistait avec une telle force, une telle conviction, qu’il passerait son chemin, voir même changerait de sens ? Et si finalement on pouvait transformer cette souffrance, ce malheur, en bonheur et en joie ?
Oui. Oui, il faudrait de la force. Mais au cours de ces longues années, j’ai fini par le comprendre.
Ma sœur, je peux m’en sortir, n’ais pas peur pour moi. Je lutterai de toutes mes forces, même si cette bataille doit se mener contre mon propre esprit, même si cette guerre emploie toutes mes forces dans la destruction du malheur et non dans la confection du bonheur. Car je veux être avec toi. Te soutenir. Te voir grandir. Vivre. Te serrer dans mes bras. Te consoler. Te voir rire. Car, ma sœur, je t’aime. Et c’est pour toi que je survis.
Alyss.