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Négociations avec la mort

fil2fer

Poète libéré
#1
Négociations avec la mort.
Et s'il ne me restait qu'à vivre moins d'un jour ?
Si la mort me disait : "Filou à toi le tour !"
"Je dois scinder ton être en deux parts inégales"
"Jeter ton âme au ciel, le reste à fond de cale".

"Ce jugement, bien sûr, est rendu sans appel"
"Et la beauté de l'homme étant d'être mortel"
"Il est fait d'un cristal que ma colère casse"
"Tu n'as qu'à mourir vite, il faut céder la place".

-----
De ma cause perdue je me fais l'avocat,
Et je me fous de ces : "Y faut qu'on ou y-a qu'à."
S'agissant de ma peau, avant de me la vendre,
Le vieil ours que je suis est prêt à la défendre.

Oubliez vos projets de me mettre au cercueil,
Et de me voir mourir faites donc votre deuil.
Je suis pince sans rire et d'une humeur spartiate
Et n'aime pas que l'on me mette ainsi en boite.

Pourtant je suis joueur et rêve du gros lot,
(Hélas, je n'ai jamais eu les bons numéros)
Et soudain par magie ou par filouterie,
Sans avoir joué je gagne à la loterie.

D'être le lauréat de vos jeux de hasard
Ne fait pas de moi un homme riche à milliards.
Car qu'ai-je donc gagné ? Je vous le donne en mille
Un voyage, aller simple, en caveau de famille.

Madame je ne suis de vos jeux le champion,
L'eau doit couler encore et longtemps sous mes ponts,
Puisque deux tiers du monde, à juger par ses fautes,
Occupe du podium une marche plus haute.

L'instant est mal choisi pour sortir mon bilan
Et mon éducation m'ayant bâti galant
Devant plus méritant humblement je m'efface,
Et aux femmes aussi je laisse cette place.

Puis j'ai trés peu de coeur et je pense, pardi,
N'avoir pas pu déja gagner mon paradis.
Mon coeur qui copie la forme des bonnes poires
Ne vaut pas plus l'enfer, ni même un purgatoire.

Vous venez ici-bas brandir mon jugement
Sans m'avoir vu pécher ou vivre saintement,
Vous êtes empressée de clouer mes six planches,
Et m'offrez le lundi ce que j'attends dimanche.

Laissez-moi donc le temps de répandre le bien
Si c'est au paradis que conduit votre train.
Ou si c'est vers l'enfer qu'on veut que je chemine
Laissez-moi profitez, au moins, de quelques crimes.

Je vivrai centenaire affirme mon docteur
Le dénier le ferait passer pour un menteur,
Aussi un autre expert tient le même dialogue
C'est un homme de coeur qui, plus est cardiologue.

Pour préserver au mieux l'honneur de ces savants,
Rendez leur science infuse en me laissant vivant.
Surtout que leur savoir doit vous faire comprendre
Qui doit vivre aujourd'hui et donc qui aller pendre.

Offrez à une star un prestigieux trépas,
Je suis un inconnu qui n'intéresse pas,
Préférez à mon âme, une âme plus célèbre
Qui éclairera mieux vos funestes ténèbres.

Piochez dans le showbiz, voilà le coup d'éclat
Vous trouverez des noms en feuilletant Gala.
Assurez-vous ce bel impact publicitaire
Plus célèbres que moi servent mieux vos affaires.

Oui plutôt qu'un pauvre hêtre, abbatez un fruitier
Tuez donc un nantis et graissez l'héritier
Je suis sans possession et ai le patrimoine
Luisant du faux éclat des tonsures de moines.

Ainsi chez le notaire enfin on entendra
Non pas des sanglots mais des youpi des hourras !
On pleure un mort cossu de plus belle manière,
Faites, avec talent, deux coups, et d'une pierre.

Les récits de tunnel, de décorporation
Prouvent trop vos doutes et vos hésitations.
La remise en question est la juste attitude
Soyons certains qu'il n'est aucune certitude.

C'est cet état d'esprit qui doit vous animer
N'est-ce pas par erreur que je suis nominé ?
Dans ce cas corrigez la faute d'orthographe
Commise sur mon nom par votre calligraphe.

Je suis prêt, pour vous plaire, à mourir un instant,
Marcher vers l'au-delà, mais d'un pas hésitant.
Testez, sans l'approuver, ma belle heure dernière,
Mais après ce coup d'oeil revenir en arrière

Pour vite retourner, quitte à faire trouillard,
Finir, en la gagnant, ma partie de billard
Ou un grand chirurgien ou une chirurgienne
Sauront gagner leur vie tout en sauvant la mienne.

Ainsi je ne suis pas le meilleur candidat,
Pour être appelé par : Dieu, Vishnu ou bouddha...
Ou ce serait vouloir accabler ma famille
Et mes charmants amis faits de cent et de mille.

Enfin, si malgré tout ces probants arguments
Je n'ai pour avenir qu'un bel enterrement,
Si vous travestissez ma modeste matière,
En feu un peu follet de fond de cimetière,

Profitez du délai dit de "rétractation",
Trois jours, pour statuer sur ma résurrection,
Et méditez ce qu'on lit dans mes évangiles,
Qui ne change d'avis est un bel imbécile.

Fil2fer le 22/10/2011.


 
#3
je t'engage de suite comme avocat à mon jugement dernier ! Mon cas sera peut-être difficile à plaider... mais tes arguments font mouche à chaque coup !
Un ENORME bravo, merci pour ce très bon moment que je prolonge en le relisant lentement pour en savourer chaque bon mot.
Avec mes amitiés, gilles.
 
#4
Je viens de me le refaire ; quel délice !
Le "pauvre hêtre" et la "partie de billard", c'est vraiment du grand art !
Quel beau dosage de profondeur et d'humour !
Encore mille bravos...
Gilles.
 

lenvol

Nouveau poète
#5
Je découvre...Je lis, et relis ton "fabuleux poème".
- Quel "Plaidoyer" ...! - Quel régal !
Je le lis à voix haute, pour mieux m'en "imprégner".
(et ne m'en lasse pas.)
J'aime l'humour "grinçant" et bien posé.
- Quel talent !
J'adore.....
Bravo fil2fer...
 

janu

Maître Poète
#6
Oh! là, çà commence bien : "il faut laisser la place..."
Ce que je me dis si souvent !!!
Toujours ce ton jubilatoire ( mais sentencieux aussi )
et qui d'emblée fait cogiter : voila le talent de l'auteur...
Quand on suit la Divine lumière blanche, on ne se pose plus de questions, mais avec ton récit, comment ne pas relire et méditer ?
Et le final me fait conclure : "bah ! on verra bien!"
si tant est qu'on voit encore quelque chose. Grande question qui hante "le roseau pensant"...
Avec toutes mes amitiés
 

sensemo

Nouveau poète
#7
Mon dieu, tu en avais donc tant à dire... mais quelle "histoire" ! Un beau et long poème, que j'ai du relire pour être sûre de tes dires et moi de ma lecture... La vie, la mort... tout un poème !!! :)

Amitiés de Maryse.
 

Judy

Maître Poète
#8
Excellent plaidoyer Maître Jetiensàmapeau!
La Dame noire ahurie va en laisser tomber sa faux à cette résistance saugrenue...lol
Enfin quelqu'un qui semble vouloir la mettre en boite ou lui faire fermer sa boite...tout simplement ou sur quelqu'un d'autre lol!
Bisous
 
#9
whaou, quel texte! j'adore tout simplement! qui n'a jamais eu envie de faire valoir ses droits devant la mort? la faire regarder ailleur que dans notre direction x) franchement j'ai beaucoup aimer cette plaidoirie ^^
 
#13
pourtant il parrait que la mort est un beau cadeau que c'est pour cela qu'on la garde pour la fin, mais toi à l'âge que tu as,,, tu as encore bien le temps d'y penser tu es loin d'en être là !
Moi avant !
Bises de Patou .
 
#14
Je m'absente un peu et voilà que fleuri ce bel écrit... c'est pas l'heure d'enfiler ton costume de sapin car tes poèmes ne sont pas tous sortis de ton écrin.
Une belle personne dont les mots résonnent de bon sens, d'amour et de passion ... Le tout avec raison...
Encore encore encore... Et la loterie finale... Je crois que c'est la seule que l'on ne souhaite pas gagner mais que malheureusement chacun y "gagne" une fois dans sa vie...
Je suis d'accord pour le plus tard possible...
Bises
Amitiés
 
#15
UN CHEF-D'OEUVRE !!!... Quel brillant avocat tu fais !!!... Mille bravos pour ce discours talentueux et plein d'humour... malgré le délicat sujet... Du grand art !... Bisous
 
#17
Vous dites qu'il n'est pas de certitudes,
Je crois que vous avez tort,
il en existe bien une,
je le dis haut et fort,
Vous êtes Monsieur,
sans flatteries aucune,
Un homme plus que talentueux
Qui dans ses superbes écris,
Nous ferai décrocher la lune,
Et nous réconcilier avec la poésie....

C'est un réel bonheur que d'être venue chez vous pour vous remercier de vos sympathiques commentaires car j'ai découvert de véritables trésors de poésies.Mille merci pour vos partages...

Très amicalement....
 

janu

Maître Poète
#18
Ah! que d'instants magiques devant ce récit de longues cogitations, de sagesse et de bon sens déja, mais toujours l'humour qui fait que rien ne peut être noir, même si l'on ne peut être jamais blanc...( de peu déja qu'on va dorer au soleil du Médoc ! ) Je n'envie pas mais j'admire encore plus le final, il me a comme un gant, jeté en duel avec la mort dont je crois être bien pus près !! Je n'aurais jamais le talent de l'exprimer avec une telle emphase qu'on en rit d'abord avant celle d'en pleurer...
sur cette mort qui ne viendra toujours que trop tôt mais qu'on apprend à accepter...
Chapeau bas, mon Ami et merci pour cette longue envolée que tu nous a fait partager
 
#19
Il ne faut jamais essayer de de penser à faire des négocaitions avec la mort sinon c'est sûr qu'elle vainquera..
Bon courage à tous à aller de l'avant en voyant clair essayer oublier les aléas et s'accrocher à l'espérance
Amitié poétique
Houssine