De jour le train vous éblouit et les lumières artificielles amplifient comme une poudre de craie le ferait sur une plaine enneigée ou un rayon de soleil sur une mer agitée. Dans ce train je n’avais point de destination finale ou alors physique car cette finalité était pour moi et quand j’écris cela je suis assis comme une fourmi sous l’ombre d’un géant qui ne la verrait même pas et qui s’apprêterait à l’écraser en ne croyant toucher qu’une portion de végétation et pourtant... Lors de cette route infernale des pigments de colère me bousculent comme les rails avec le train, comme la texture de mon siège rose violet frottant et tripotant mes bras, mes jambes et ma tête qui n’en finit plus de ruminer toutes les insanités qu’elle a pu cracher par le biais de sa langue aiguisée aux êtres qui, effrayés, ne savaient que faire. Et désormais j’écoutais la mélodie de la percution de ces doux rails ou l’inverse, ce qui ajoutait à mon esprit une lourde note d’inquiétude. Cette gare qui se rapprochait rail par rail devenait dans mon imaginaire un monstre fleurissant de toutes mes quiétudes et bouleversements, même le paysage à portée de mes yeux ne savait calmer cette bête qui maintenant s’en allait pour combler ses désirs, respirer, avancer, dialoguer et voir mais aussi écrire s’exprimer, se divertir de tout ce que la liberté pouvait offrir à un prisonnier évadé. On avait tellement tiré sur sa laisse qu’elle n’arrivait même plus à bailler, elle avait au bout de multiples moments de patience répétés et acharnés, réussi à creuser, bottes de terres après bottes de terre, son chemin, sa piste, son billet de sortie qui lui aurait valu la prison à perpétuité. Une prison bien méritée avec à la clé une massue qui pendant nombre d’années, frère, père, sœur et mère ou copain, copines ou inconnu prenaient et avec détermination plantaient avec rage sur mon cœur qui ne cessait d’éclabousser de mille délires des victimes, des ennemis pour ne pas que le sang coagule et la tue complètement.