Au café de Flore,
Les grands sont passés,
Mais pourquoi ont-ils continué
à le fréquenter ?
Le savez-vous ?
Ils attendaient le pigeon,
Et ils guettaient le ciel
d’où il était arrivé,
En buvant je ne sais pas
En disant de grandes pensées
Entre deux plaisanteries
Entre deux cigarettes
Et les serveuses pour deux rires
Mais ils guettaient le pigeon
Sans jamais se le dire
Sans jamais se l’avouer
Et ils ne voulaient plus partir
Alors ils écrivaient de grandes choses en attendant,
De belles choses
pour passer le temps,
Lorsque la nuit tombait
Malgré l’église qui sonnait
l’heure du repos qui arrivait,
Ils jouaient aux cartes pour se distraire
Mais ils perdaient tous
parce qu’entre deux tours
ils guettaient le retour du pigeon
Mais pourquoi l’attendaient-ils ?
Le savez-vous ?
Il y en a tant sur les trottoirs
A picorer je ne sais pas
Il y en a tant sur les boulevards
A s’ becqueter sans convenance,
Mais ce pigeon, il était entré dans le café,
Un sac-à-dos sur son voyage,
Il avait l’air fatigué
parce qu’il avait beaucoup volé,
Il avait réclamé un café
et puis aussi un jus d’orange ;
Ses ailes étaient dorées,
Il avait emmené le soleil avec lui,
Ils avaient fait amis-amis
Il avait le cou multicolore comme une écharpe,
L’arc-en-ciel ne voulait pas qu’il s’enrhume,
Et ses pattes étaient toutes neuves,
Une poule amoureuse
Les lui avait pondus ;
Il avait bu son café et son jus d’orange
Il avait écrit une lettre à ses amis
Il avait demandé l’addition
et l’avait réglée,
Il avait souhaité en partant
une bonne journée aux grands
et une bonne continuation,
Et il était reparti
les ailes déployées,
Il n’était plus fatigué ;
C’est pour cela
que les grands le guettait ;
Ils en ont passé du temps
à se retrouver dans ce café
pour ne plus y penser ;
Ils en ont écrit des pages,
Ils en ont bu des verres,
Leurs rires résonnent encore
sur les murs repeints en vert,
Mais ils guettaient en vérité
le pigeon,
Pour pouvoir lui demander
d’où il était parti,
Et rejoindre son pays ;
Et c’est comme cela
que leurs livres se sont écrits,
Que leurs pensées se sont ouvertes ;
Et dans ce café devenu légendaire,
Les touristes du monde entier
s’en viennent boire un petit verre
Quand ils s’arrêtent en vérité,
Sans se le dire sans se l’avouer,
Guetter le retour du pigeon
Pour lui demander
d’où il est parti,
Quel est son pays,
et quitter le café
les ailes déployées.