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le ministère des anciens combattants (Val de Fontenay)

babyfruit

Grand poète
#1
Semaine après semaine un curieux manège
Se répète immuable que rien ne transgresse.
Ce n'est point une troupe encore moins un cortège​

Mais plutôt une horde qui défile sans cesse.
Ils arrivent à toute heure comme à leur gré il sied
Et repartent de même, images fugitives.
Où vont-ils? Qui sont-ils? Ces météores sur pied
Spectacle hallucinant que cette marée humaine
De laquelle il sourd un babil permanent.
La plupart attifés comme des croque-mitaines
Des pieds jusqu'à la tête ne sont que des manants.
Agents publicitaires pour centres commerciaux
Ils déambulent toujours les bras chargés de sacs,
Dedans point de lingots sinon des haricots
Et des couches-culottes entassés tout en vrac.
Parfois ils s'arrêtent et laissent courir leur langue,
Celle-ci infatigable potine à qui mieux mieux.
Une assemblée se forme débute une harangue
Où des rumeurs s'écoulent en des flots insidieux.
Noyés dans cette masse et comme anachroniques
De rares individus au costume bien mis,
Derrière leur journal ignorent cette clique.
Ces beaux esprits si fiers n'ont pas que des amis
Et leurs oreilles doivent parfois siffler quelque peu.
Ainsi, au fil des jours s'ébranle ce joli monde
Hétéroclite en diable comme une foire à neu-neu.
D'où viennent-elles? Où vont-elles ces âmes vagabondes?
Au ministère pardi des anciens combattants.
Ce moderne édifice aux façades de verre
N'abrite que des ruines depuis la nuit des temps.
Musée de la poussière, vestige de toutes les guerres,
Royaume des squelettes et des papiers jaunis,
Il traverse les âges tout comme un cœlacanthe
Prolongeant chaque année une longue agonie.
Voici donc d'où provient cette masse grouillante,
D'un bâtiment figé dans sa gangue d'ennui.
Dix fois, vingt fois, cent fois, sa mort fut annoncée
Puis démentie de suite jusqu'à aujourd'hui.
Délocalisation! Le mot est prononcé
Dans trois mois maintenant l'échéance est fort brève.
Adieu donc ami! Les temps sont trop cruels
Pour toi qui abritait l'océan de mes rêves.
Je t'aimais malgré tout vieille citadelle
Dont les douves profondes s'ouvraient sur le néant.
Adieu vieux complice de près de quinze années!
Je te fus, tu le sais, infidèle souvent.
J'étais si jeune alors et toi bien suranné
Tu sus lire mon âme et m'offris ton pardon
Pour mes incartades et mes fugues d'un jour.
Oh! Qu'il m'est pénible cet ultime abandon
Tu peux mourir demain je t'aimerai toujours!​