Chapitre I
J’ai mis le plan en branle en mimant cette voix
De nos matins qui tremblent : « Ne comptez pas sur moi,
Je suis cloué au lit - sûrement un virus -,
Je reviendrai jeudi pour l’accueil des deux Russes. »
J’avais, la veille, un peu feint des toussotements
Et puis rougi mes yeux par divers frottements
De sorte qu’aujourd’hui « Je suis bien abîmé »,
Me croit monsieur Dupuis au bout du combiné.
Étape 1 franchie, j’enclenche la deuxième :
Sous le doux friselis de la douche au 3ème,
J’entonne du Carmen : « Près des remparts (...) Pastia, »
- Grand dieu quel chant amène ! - « (...) -re du manzanilla ! »
Aux nombreux filets d’eau qui réchauffent mon corps
S’ajoute l’OBAO, utilisé à tort.
Je suis doux, je sens bon, au cou ma jugulaire
Pulse une eau de London qui parfume les airs.
8 h 20 au portable : j’ai encore de la marge
Pancakes/sirop d’érable et musique de barjes,
Il me reste 2 h pour me bien préparer
Avant que le facteur n’apporte le paquet.
Alors je prends ma box, je cale la playlist,
- mélange hétérodoxe de Pygmées et de Liszt -
Et puis je batifo-le dans ma liberté
Dont toujours je raffole en petits apartés :
Je monte et je descends les escaliers nombreux,
4 à 4, content, et j’aboie même un peu.
Dans la grande maison, je suis Roland le Preux,
Perceval au blason, un roi parmi les gueux.
Voilà de ça 20 jours que je l’ai commandée
Sur un site où l’amour ne peut faire bander
Que quand la carte à puce s’est déjà fait pomper
Le montant que facturent les marchands de poupées.
‘Marquiz de Pompamour’, ‘Diane Cocotiers’
- Les temples de l’amour ont les noms du métier -
‘La Belle Hélène d’Étroit’, ‘Gabrielle d’Entrées’
- Cet embarras du choix m’a laissé hébété -
Finalement j’attends une étrange beauté :
‘Madam’ de Maintenant’, dont l’immédiateté
Intrinsèque promise, ainsi que les attraits
Et la bouche cerise tant m’enjouent que m’effraient.
J’ai depuis, plusieurs fois, rêvé devant la page
Où figure ce choix de lumineux ramages ;
Tendre technicité et jouissance étonnée,
Solitude peuplée, élans éperonnés :
Messianique enjoué : « C’est la Terre promise,
La source à Siloé ! Jamais depuis Moïse
La conscience éveillée n’avait au fond du puits
Si vivement loué la venue du Messie ! »
Légionnaire artilleur : « Ogives magnifiques,
Culasse aussi, d’ailleurs ; tranchées pyrotechniques.
Le calibre est parfait pour des salves précises ;
On en ressort en feu que sa grenade attise. »
PDG éjecté : « Bilan trop décoré :
Il a fallu sauter sans parachute doré.
Ma femme m’a quitté - je n’la faisais plus jouir -
Mais ma jolie poupée m’apprend à rebondir. »
Ouvrier licencié : « Plan social pas trop cool,
Mais j’ai bien négocié : jackpot à 20 000 boules !
J’ai vit’ quitté ma femme - ell’ ne me f’sait plus jouir -
Pour déclarer ma flamme à Madam’ tous les jours. »
Anachorète ému : « Sorti de mon désert,
Elle a su mettre à nu mes plus sombres désirs :
Par-devant, par derrière, dans l’antre du démon,
J’ai trouvé des lumières aussi pur’s qu’un diamant. »
Mécano diéséliste : « Y’en a sous le capot !
L’agrégat est robuste, l’émotion C K Do.
Préchauffe et injection, combustion et détente
La chambre d’admission est un enfer de Dante. »
Circumnavigateur : « Après le tour des globes
Baptême à l’équateur : je me suis senti homme !
Pot-au-noir épuisant avec un nœud unique ;
40ème rugissant agrippé au grand fuck. »
Vibrant octogénaire : « À mon âge, le sexe
Ressemble à un faussaire : un accent circonflexe
Sur le « e » du mot rêve. Et pourtant la chaleur
De cette nouvelle Ève ravive mes ardeurs. »
Gestionnaire de hedge funds : « Bottom-up en approche
J’ai pu toucher le fonds : grosse ambiance de gold rush,
Cours de bourse volatile ; ébloui par le spread,
Mon top-down érectile m’a laissé presque raide. »
Astronome poète : « Dans cette apothéose
De la lune secrète, mon télescope rose
N’a vu au firmament que cette voie lactée
Où s’étiole l’amant qu’un trou noir a happé. »
Maigrichon nietzschéen : « S’il est un arrière-monde
De feux apolliniens, mon âme vagabonde
L’a bien su renverser de santé dionysiaque :
Dieu est mort, transpercé par l’axe de Priape ! »
Noble de l’Armorial : « Je hais le voussoiement
De mon amour sponsal : je me préfère amant
De ma belle déesse où tout est synthétique,
Quand pleuve sur ses fesses mes jurons sans éthique. »
L’Amour est dans le Pré : « Entre les granulés
Et les vaches à rentrer, j’ai pu manipuler
Ma nouvelle trayeuse. Dans la salle des cuves
Crévindiou ! Mes joyeuses ont fondu dans l’étuve ! »
Particulier élémentaire : « Je soutiens ce concept !
Il nuit à la misère en érigeant le sceptre
De la révolution : la jouissance est pour tous !
Fini l’aliénation du sexe et des partouzes ! »
Conducteur de Logan : « Robuste et fonctionnelle,
Dotée de beaux organes, j’ai tout fait manuel.
Train avant, bas de caisse ; j’ai perdu mes esprits
Dans cette Mercedes qui vaut plus que son prix. »
Ancien surréaliste : « Amante religieuse,
Veuve noire hystérique, ses courbes aguicheuses
Sont une muleta : je n’y fus qu’un taureau,
Un pois sauteur dada se perdant au tarot. »
Bouddhiste de Toulouse : « Dans cette impermanence
De la vie qui nous blouse, j’ai connu cette transe
Qu’offre la vacuité : par ses trois véhicules
La foudre a agité toutes mes particules. »
Champion de MMA : « Pour mon anniversaire,
J’avais reçu chez moi ma plus rude adversaire :
Elle m’a laissé KO comme un gentil toutou ;
Depuis je fais dodo avec elle en doudou. »
Jeun’ puceau prétentieux : « Sous mes coups de pilon,
Elle aurait vu les cieux tant j’ai, dans ses filons,
Fait de feu d’orifices ! Sûr qu’elle aurait crié,
Imploré le Saint Fils quand je la ferraillais ! »
Survivant aux abois, lapidaire éconduit :
« Je ne le savais pas, la poupée me l’a dit :
Allergique au latex, choc anaphylactique,
Pire qu’une Durex, en moins prophylactique. »
Je suis jaloux, bien sûr, qu’elle ait eu autant d’ex,
Mais je tais ma blessure ; ainsi va la tendresse
À notre folle époque : individualiste,
Que l’industrie escroque d’amours généralistes.
Chapitre II
J’ai mis le plan en branle en mimant cette voix
De nos matins qui tremblent : « Ne comptez pas sur moi,
Je suis cloué au lit - sûrement un virus -,
Je reviendrai jeudi pour l’accueil des deux Russes. »
J’avais, la veille, un peu feint des toussotements
Et puis rougi mes yeux par divers frottements
De sorte qu’aujourd’hui « Je suis bien abîmé »,
Me croit monsieur Dupuis au bout du combiné.
Étape 1 franchie, j’enclenche la deuxième :
Sous le doux friselis de la douche au 3ème,
J’entonne du Carmen : « Près des remparts (...) Pastia, »
- Grand dieu quel chant amène ! - « (...) -re du manzanilla ! »
Aux nombreux filets d’eau qui réchauffent mon corps
S’ajoute l’OBAO, utilisé à tort.
Je suis doux, je sens bon, au cou ma jugulaire
Pulse une eau de London qui parfume les airs.
8 h 20 au portable : j’ai encore de la marge
Pancakes/sirop d’érable et musique de barjes,
Il me reste 2 h pour me bien préparer
Avant que le facteur n’apporte le paquet.
Alors je prends ma box, je cale la playlist,
- mélange hétérodoxe de Pygmées et de Liszt -
Et puis je batifo-le dans ma liberté
Dont toujours je raffole en petits apartés :
Je monte et je descends les escaliers nombreux,
4 à 4, content, et j’aboie même un peu.
Dans la grande maison, je suis Roland le Preux,
Perceval au blason, un roi parmi les gueux.
Voilà de ça 20 jours que je l’ai commandée
Sur un site où l’amour ne peut faire bander
Que quand la carte à puce s’est déjà fait pomper
Le montant que facturent les marchands de poupées.
‘Marquiz de Pompamour’, ‘Diane Cocotiers’
- Les temples de l’amour ont les noms du métier -
‘La Belle Hélène d’Étroit’, ‘Gabrielle d’Entrées’
- Cet embarras du choix m’a laissé hébété -
Finalement j’attends une étrange beauté :
‘Madam’ de Maintenant’, dont l’immédiateté
Intrinsèque promise, ainsi que les attraits
Et la bouche cerise tant m’enjouent que m’effraient.
J’ai depuis, plusieurs fois, rêvé devant la page
Où figure ce choix de lumineux ramages ;
Tendre technicité et jouissance étonnée,
Solitude peuplée, élans éperonnés :
Messianique enjoué : « C’est la Terre promise,
La source à Siloé ! Jamais depuis Moïse
La conscience éveillée n’avait au fond du puits
Si vivement loué la venue du Messie ! »
Légionnaire artilleur : « Ogives magnifiques,
Culasse aussi, d’ailleurs ; tranchées pyrotechniques.
Le calibre est parfait pour des salves précises ;
On en ressort en feu que sa grenade attise. »
PDG éjecté : « Bilan trop décoré :
Il a fallu sauter sans parachute doré.
Ma femme m’a quitté - je n’la faisais plus jouir -
Mais ma jolie poupée m’apprend à rebondir. »
Ouvrier licencié : « Plan social pas trop cool,
Mais j’ai bien négocié : jackpot à 20 000 boules !
J’ai vit’ quitté ma femme - ell’ ne me f’sait plus jouir -
Pour déclarer ma flamme à Madam’ tous les jours. »
Anachorète ému : « Sorti de mon désert,
Elle a su mettre à nu mes plus sombres désirs :
Par-devant, par derrière, dans l’antre du démon,
J’ai trouvé des lumières aussi pur’s qu’un diamant. »
Mécano diéséliste : « Y’en a sous le capot !
L’agrégat est robuste, l’émotion C K Do.
Préchauffe et injection, combustion et détente
La chambre d’admission est un enfer de Dante. »
Circumnavigateur : « Après le tour des globes
Baptême à l’équateur : je me suis senti homme !
Pot-au-noir épuisant avec un nœud unique ;
40ème rugissant agrippé au grand fuck. »
Vibrant octogénaire : « À mon âge, le sexe
Ressemble à un faussaire : un accent circonflexe
Sur le « e » du mot rêve. Et pourtant la chaleur
De cette nouvelle Ève ravive mes ardeurs. »
Gestionnaire de hedge funds : « Bottom-up en approche
J’ai pu toucher le fonds : grosse ambiance de gold rush,
Cours de bourse volatile ; ébloui par le spread,
Mon top-down érectile m’a laissé presque raide. »
Astronome poète : « Dans cette apothéose
De la lune secrète, mon télescope rose
N’a vu au firmament que cette voie lactée
Où s’étiole l’amant qu’un trou noir a happé. »
Maigrichon nietzschéen : « S’il est un arrière-monde
De feux apolliniens, mon âme vagabonde
L’a bien su renverser de santé dionysiaque :
Dieu est mort, transpercé par l’axe de Priape ! »
Noble de l’Armorial : « Je hais le voussoiement
De mon amour sponsal : je me préfère amant
De ma belle déesse où tout est synthétique,
Quand pleuve sur ses fesses mes jurons sans éthique. »
L’Amour est dans le Pré : « Entre les granulés
Et les vaches à rentrer, j’ai pu manipuler
Ma nouvelle trayeuse. Dans la salle des cuves
Crévindiou ! Mes joyeuses ont fondu dans l’étuve ! »
Particulier élémentaire : « Je soutiens ce concept !
Il nuit à la misère en érigeant le sceptre
De la révolution : la jouissance est pour tous !
Fini l’aliénation du sexe et des partouzes ! »
Conducteur de Logan : « Robuste et fonctionnelle,
Dotée de beaux organes, j’ai tout fait manuel.
Train avant, bas de caisse ; j’ai perdu mes esprits
Dans cette Mercedes qui vaut plus que son prix. »
Ancien surréaliste : « Amante religieuse,
Veuve noire hystérique, ses courbes aguicheuses
Sont une muleta : je n’y fus qu’un taureau,
Un pois sauteur dada se perdant au tarot. »
Bouddhiste de Toulouse : « Dans cette impermanence
De la vie qui nous blouse, j’ai connu cette transe
Qu’offre la vacuité : par ses trois véhicules
La foudre a agité toutes mes particules. »
Champion de MMA : « Pour mon anniversaire,
J’avais reçu chez moi ma plus rude adversaire :
Elle m’a laissé KO comme un gentil toutou ;
Depuis je fais dodo avec elle en doudou. »
Jeun’ puceau prétentieux : « Sous mes coups de pilon,
Elle aurait vu les cieux tant j’ai, dans ses filons,
Fait de feu d’orifices ! Sûr qu’elle aurait crié,
Imploré le Saint Fils quand je la ferraillais ! »
Survivant aux abois, lapidaire éconduit :
« Je ne le savais pas, la poupée me l’a dit :
Allergique au latex, choc anaphylactique,
Pire qu’une Durex, en moins prophylactique. »
Je suis jaloux, bien sûr, qu’elle ait eu autant d’ex,
Mais je tais ma blessure ; ainsi va la tendresse
À notre folle époque : individualiste,
Que l’industrie escroque d’amours généralistes.
Chapitre II
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