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Les pensées célèbres, celles de la Vagabonde de la Poésie, les pensées Momoriciennes et les vôtres si le coeur vous en dit

Les vieux pieds de vigne de Loupiac !
Récit définitif !

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Les vieux pieds de vigne de Loupiac… définitif.

Il existe des petits coins de France où les traditions se perdent, hélas !

A Loupiac, l’endroit le plus propice aux rencontres entre gens du pays était naturellement le bistrot. Chacun avait sa petite anecdote à raconter et évidemment même si on ressassait souvent les mêmes anecdotes, c’était toujours avec un égal plaisir que l’on tendait l’oreille pour les écouter autour du bar après quelques tournées au bon vieux rouge ou blanc des coteaux environnants et un bon château Loupiac. C’est quand même quelque chose n’est-ce pas ?
Ce soir-là, en guise d’amuse-gueules allait retentir l’aventure du Gabriel et du Jantou.
Une sacrée rigolade allait s’ensuivre !
En tout début de soirée, on avait déjà évoqué pour chauffer l’ambiance le fameux jour où lors de l’enterrement du pauvre Louis, un très gros pavé lancé avec force était tombé dans la vasque du bénitier au premier rang de l’église, baptisant généreusement une deuxième fois lors de leur sainte existence, une grande partie des grenouilles en pleurs. Cela fera l’objet d’une autre histoire. Toujours est-il qu’elle avait permis au conteur de service de se remémorer celle que je vais vous relater maintenant.
Le fait divers qui va suivre a entretenu les rires bien après qu’il se soit déroulé dans les fermes du grand secteur de Causse et Diège lors des veillées autour d’un bon feu de bois.
Lorsque notre brave Gabriel rentrait du boulot il croisait régulièrement "le Jantou" installé dans son automobile qui devait dater de la dernière guerre, et régulièrement ce chauffard restait en phare alors que la nuit plombait déjà largement le secteur !
Il décuvait au volant car il respectait à la lettre la recommandation du ministère de la santé de l’époque qui préconisait à un travailleur de boire au moins un litre de vin du pays par jour!
Cette phrase était affichée un peu partout dans les lieux du service public, Jantou la connaissait par cœur et retenait surtout la mention sans équivoque «au moins» qu’il appliquait à la lettre, croyez-moi sur parole !
La même mesure était également mise en avant pour le bienfait du tabac !. Enfin, vous l’avez compris le mot d’ordre était : « Tous engagés pour soutenir la viticulture et l’agriculture de notre belle région ! ».
Notre Jantou finissait toujours sa terrible journée dans le bistrot de la Marcelle avec les éternels habitués du coude levé.
Voici en quelques phrases comme a commencé cette histoire.
«Miladiou !…s’exclama le Gabriel, je prends tout le monde ici à témoin ! Je vous fais le pari de trois tournées gratuites que si le Jantou me remet les phares en pleine tronche comme il a l’habitude de le faire presque tous les soirs je lui fonce dessus !».
« T’as que de la gueule, tu ne le feras pas !…», reprirent en cœur les piliers de comptoir.
« Eh bien, c’est ce que l’on va voir ! »
Le Jantou, qui bien entendu était présent a immédiatement pensé : « Il est con, mais pas à ce point quand même !» tout en se réjouissant déjà de picoler gratuitement peu de temps après !
Le soir de la rencontre tant espérée ne tarda pas, alors qu’il roulait tranquillement, Gabriel vit arriver face à lui, feux de route enclenchés l’animal à abattre !
Enfin, c’est ce qu’il pensa, et profitant de l’aubaine sans hésiter une seconde les bras crispés sur son bolide il se dirigea droit vers sa cible !
Il ne le savait pas encore, mais il allait être victime d’un double choc !
Les véhicules s’arrêtèrent net dans un fracas de tôles assourdissant.
Gabriel était fier de lui, son pari il l’avait désormais en poche !
A peine remis de cette intense émotion, il se dégagea de l’épave et vit face à lui deux lumières vives qui le fixaient avec insistance en plein visage !
Qu’avait-il donc fait au bon dieu pour que tant de rayons lumineux de forte intensité s’acharnent ainsi continuellement sur lui ?
Il comprit presque aussitôt et, tout en faisant virevolter son couvre-chef sur sa tête comme il avait pris l’habitude de le faire devant les situations grotesques, il aligna ces paroles qui restèrent à jamais gravées dans la mémoire collective des habitants du village, tant elles étaient appropriées à la scène imprévue !
« Aqueth còp si èi pas tròp lusit ! »
« Ce coup-ci je n’ai pas trop brillé !».
En effet, face à lui deux pandores
du coin se rapprochaient afin d’entreprendre un brin de causette !
Il leur expliqua bien évidemment sans se démonter une seconde, qu’il avait été ébloui par les phares de leur voiture !
On a beau être assermenté on se doit avant tout de respecter le code de la route n’est-ce pas ?
Ils lui demandèrent dans la foulée s’il avait bu, visiblement après quelques exercices physiques appropriés afin de détecter l’alcoolémie du chauffard suspecté. Par un miracle que je ne saurais vous expliquer, ce jour là, Gabriel était resté sobre comme un chameau !
Était-ce dû à une petite cure de désintoxication en prévision du froissement de tôle pour ne pas rater sa cible ?
Les gendarmes n’ont cependant pas reconnu leurs torts et l’ont assigné à se rendre devant un juge au tribunal de Rodez, pour s’expliquer sur cet étrange comportement !
Le jour J, notre homme droit dans son costume en velours trois pièces, montre gousset en poche, expliqua que la voiture officielle était arrivée face à lui en l’aveuglant à la manière d’un soleil rasant un matin d’octobre et qu’il n’avait absolument rien pu faire pour l’éviter !
Il insista sur le fait qu’il n’avait pas bu !
Le jugement a été prononcé sur-le-champ, son explication ayant été suffisamment convaincante aux yeux de la magistrature.
Gabriel est donc ressorti blanchi de l’accusation injuste stipulée dans le procès verbal !
Quand on dit qu’il n’y a pas de justice dans notre pays on se trompe lourdement, notre poivrot vient à l’instant de vous en apporter la preuve formelle !
On n’a jamais su au pays si les agents avaient été réprimandés pour faux en écriture !
Lorsque vous passerez à Loupiac dorénavant, vous aurez je l’espère un autre regard sur l’ancien petit bistrot de la Marcelle.
Le pauvre Gabriel malgré sa bonne volonté, n’a pas eu droit aux trois tournées gratuites, la cible touchée n’ayant pas été la bonne ! il il a dû s’exécuter et payer sa dette !
On est fidèle à sa parole quand on habite Loupiac !
Malgré ce manque de chance évident vous en conviendrez avec moi, dans un élan de générosité que tous les habitués du troquet lui connaissaient et pour asseoir sa réputation de pilier de comptoir éternellement , il
a laissé une coquette somme d’argent à la patronne afin que l’ensemble des pieds de vigne les bras accoudés au comptoir, puissent le jour de son enterrement trinquer et porter plusieurs toasts à la santé de son âme !
Tout en racontant, n’en doutons pas une seconde le petit récit que je viens de coucher sur cette page.
Quant à notre brave Jantou, il a remercié chaque jour le seigneur de sa bienveillance, en propulsant Gabriel miraculeusement dans les bras des forces de l’ordre.
Vous trouverez bien une morale à ce conte véridique ?
 
Dernière édition:

lilasys

Maître Poète
Quand la cloche résonne version définitive !
Quel travail je suis épuisé !

Quand résonne le son de la cloche à l’école primaire de Capdenac Gare années : 1958…1959…1960.

Ding…dingue…donc !

L’enfant aux deux ombres

Dieu, qu’il me semble lourd le son de la cloche qui résonne sous le ciel pâle de septembre. Je l’ai entendu à trois reprises dans la cour de l’école primaire de Capdenac Gare!
J’allais enfin découvrir la grande école, après une maternelle cousue main d’époque, dans le petit village du Mas de Noyer où j’ai appris à pétrir la pâte à modeler un couple d’années, sous l’ œil noir et glacial d’une institutrice qui déjà reconnaissait en moi très certainement un don d’artiste sculpteur, et qui me laissait réaliser des œuvres en long, en large et parfois même en travers tout en me gratifiant d’une paix royale.
Après ce brillant passage à la maternelle j’allais enfin fièrement commencer mes vraies études dans une grande école accompagné de mon fidèle frère à peine plus âgé que moi.
Immédiatement assis à ses côtés j’ai compris que le fond de la classe m’était assigné! Quelle délicate attention ! peu importe je disposais d’une bonne vue et j’étais déjà un grand garçon pour mon âge, les trente petites têtes assises devant moi n’allaient en aucun cas éclipser le tableau noir !
Mon aîné ne paraissait pas très éveillé pour son âge, la maîtresse en s’approchant de moi, m’a dit d’une voix sèche : « toi, Maurice, tu t’occuperas de Didier !…» Tiens, me voilà déjà investi d’une responsabilité, ici au moins on me fait confiance!
J’allais vite déchanter. Dans cet environnement public, je devenais sans le savoir un auxiliaire de vie scolaire, non rémunéré bien entendu. L’enfant aux deux ombres entrait déjà dans la vie active sans le vouloir et surtout sans le savoir!
Ma tâche toutefois restait simple, il faut bien le reconnaître!
Je devais simplement subvenir à la déficience mentale de Didier, dans tous les gestes de la vie quotidienne et surtout m’organiser pour ne déranger personne!
La porte de la classe donnant sur la cour de récréation se trouvait à deux pas de moi, et on m'avait laissé carte blanche, je pouvais à tout moment quitter l’endroit pour accomplir mon travail, qui je dois le reconnaître ne me déplaisait pas. Il n’existe pas comme vous l’avez appris de sot métier.
J’usais de ma faible intelligence pour agrémenter cette responsabilité dépourvue de lourdeur administrative!
Il m’avait semblé au tout début qu’après l’institutrice j’occupais le poste le plus important de la salle de classe.
Les jours se succédaient dans une ambiance bonne enfant, je me désintéressais totalement des paroles de l’intellectuelle qui dans des élans non contrôlés je suppose, allait finir par me dire régulièrement : « Toi Maurice, tu resteras un âne, tu ressembles comme deux gouttes d’eau à ton frère ».
Je n’avais pas pas l’impression que c’était l’image que me renvoyait le miroir!
J’ai appris bien plus tard que le quadrupède aux grandes oreilles faisait partie des cinq animaux les plus intelligents sur terre, ce n’est pas par hasard qu’il refuse d’avancer quand on l’attelle à un carreton !
Mais revenons à l’état de santé de Didier qui empirait de mois en mois, ma deuxième âme devenait de plus en plus pesante.
Il fallait que je sois le bouclier de ses humeurs changeantes avec la rapidité de l’éclair,
je contenais ses réactions soudaines, je me tenais constamment près de lui pour protéger les enfants de ses crises de nerfs qui pouvaient prendre des proportions énormes ! S’ajoutait à cela la sempiternelle question de l’ensemble des écoliers : qu’est-ce qu’il a ton frère pourquoi il est comme ça ?
Je les remercie indirectement aujourd’hui car peu à peu j’ai compris que nous étions finalement différents!
J’essayais tant bien que mal de répondre à cette interrogation et mon imagination me permettait d’avoir une réponse un peu différente tous les jours.
Les cent cinquante élèves de la cour dans une ronde incessante avaient une soif insatiable ils voulaient comprendre !
Cependant, malgré cet étalage de phrases curatives j’ai vite réalisé qu’aucune ne pourrait satisfaire la curiosité de cette petite communauté en galoches et culottes courtes!
Devenu un vrai saint-Bernard, mon dévouement était sans limite. Mes pauvres parents pris par le dur labeur de la petite ferme familiale ne se doutaient de rien, mes jours passaient ainsi cadencés par un monde aux fausses allures fraternelles.
Lors du deuxième son de cloche, j’assistai pour la première fois à l’appel des élèves pour le passage en classe supérieure, Inutile de vous dire que je n’ai pas entendu mon nom résonner. Je devenais un redoublant, je méritais sûrement cette sentence car mème si inconsciemment mes grandes oreilles étaient attentives aux les paroles de la maîtresse rien ne voulait vraiment germer en moi !
À l’écrit je dois bien le reconnaître je ne faisais pas beaucoup d’efforts, mon travail comme vous l’avez compris restait désespérément ailleurs!
Me voilà donc de retour à la place qui m’était assignée, je retrouvais avec un certain plaisir le banc ciré par mes fesses l’année précédente, et près de moi une tête bien connue qui devenait naturellement plus lourde, par contre l’horizon se dégageait et je disposais désormais d’une vue imprenable sur le tableau noir!
Mon occupation restait la même je la possédais par cœur, il me suffisait de subvenir à tous les gestes courants d’une seconde vie!
Je me fixais pourtant l’objectif d’une bonne année scolaire.
J’apprenais dans mon coin et tout me paraissait simple, la meneuse d’enfants pour autant ne me faisait pas de cadeau. Face à ses yeux vitreux je représentais toujours l’esclave et surtout le bourricot!
Ainsi l’année passa-t-elle, rien ne me laissa entrevoir une quelconque amélioration j’étais voué à ce triste sort.
Peu importe, je devais avancer malgré les brimades et le poids de mon fardeau. Didier, malade mentalement et physiquement vomissait abondamment de la bile, face à cette nouvelle situation j’éprouvais une certaine honte vis-à-vis de mes petits camarades et je m’efforçais de leur cacher cette nouvelle catastrophe, j’essayais de tout anticiper je maîtrisais ma fonction de soignant parfaitement!
Il rentrait parfois dans des colères monstres, se mordait le poignet, je le calmais aussi rapidement que je le pouvais, en ces temps reculés les neuroleptiques hélas n’existaient pas encore.
Le troisième son de cloche fut semblable au deuxième et aboutit la même sanction. Figé, je ne bougeais plus du rang, je triplais ainsi le cours préparatoire sans comprendre la décision qui avait été prise par la bande d’instituteurs qui arpentait la cour dans des allers retours incessants !
J’ai fini par posséder la teneur des cours sur le bout des doigts, j’aurais je vous l’avoue pu remplacer l’an-saignante psychorigide !….Ne cherchez pas, je n’ai pas fait de faute, mon for intérieur se révoltait et il était en droit de le faire n’est-ce pas?
J’ai donc encore rejoint mon petit bureau qui devenait de plus en plus petit, boulet au pied! Maurice demeurait l’enfant nécessaire à Didier plus que jamais. On ne pouvait envisager de le scolariser sans moi, d’ailleurs dans un sursaut d’intelligence il avait dit : « Je ne veux pas aller à l’école sans Maurice ! ».
J’ouvre une petite parenthèse pour vous dire que je n’avais pas de devoirs à faire le soir en rentrant à la maison, je pouvais donc me concentrer sur un rôle qui m’était entièrement assigné.
Mon père dès que j’arrivais à la ferme après ma rude journée me disait d’aller détacher les vaches pour les garder, ce que je faisais avec plaisir, j’ai toujours adoré les animaux. Eh bien, savez-vous ce qu’il se passait ?
Mon fidèle frère était à mes côtés pour m’aider !
Les cloches mènent au clocher des églises. Le jour béni de la communion solennelle le curé de Capdenac-le-Haut m’a dit clairement: «Maurice il faudra que tu parles deux fois plus fort que les autres communiants pour que le seigneur puisse entendre la voix de ton frère !
Bien plus tard il m’avouera avoir été en admiration devant ma petite personne à qui il reconnaissait un sacrifice sans limite.
Il m’a confié ces mots ! « Toi, Maurice, tu rencontreras le Christ ! ».
Depuis je me demande avec une grande anxiété ce que je vais bien pouvoir lui dire!
Mais ne nous égarons pas comme des brebis, et revenons aux deux cloches ou ânons de cette histoire.
Cette troisième année au cours préparatoire la plus longue pour moi, je la dois sûrement en partie à une des rares phrases raisonnées de Didier, qui pouvait laisser penser qu’il allait peut-être refaire un jour surface.
À la remarque « Tu as renversé l’encrier sur le bureau, ce n’est pas bien, vilain !», il a répondu : « Ce n’est pas grave, on dira que c’est l’imbécile qui a fait ça ! ».
Ma taille devenait à mes yeux très encombrante, je grandissais très vite, trop vite !…Je toisais facilement deux têtes de plus que les petits bonhommes assis devant moi, un sentiment de honte m’envahissait mais j’étais impuissant face à cette fatalité voulue par l’infâme mégère, qui continuait à me brider, que dis-je à m’enterrer dans un cynisme savamment orchestré!
L’année harassante passa ainsi, je portais une croix de plus en plus blessante sur mes frêles épaules, j’étais confronté de plus en plus aux coups bas des enfants dans la cour je vivais en enfer.
Au quatrième son de cloche, je suis sorti enfin du rang pour connaître le cours élémentaire première année dans un soulagement total, mon frère allait à nouveau s’asseoir près de moi au fond de la classe, on ne change pas les habitudes qui fonctionnent aussi rapidement!
L’instituteur m’est apparu comme un dangereux psychopathe, les coups de règle pleuvaient sur les petites têtes!
Rien n’avait changé dans mon rôle je me rendais toujours à l’école le ventre serré, je refusais intérieurement ces conditions anormales, je ressentais de plus en plus la fatigue, je souhaitais mourir.
Reconnu malade après une analyse sanguine, j’ai été hospitalisé au milieu de l’année scolaire. Chaque jour pendant plusieurs semaines dans une clinique j’ai tendu le bras pour des transfusions, je me suis remis lentement enfin seul et libéré d’un monde très cruel.
Puis est venu le temps de ma convalescence, mes parents ont enfin compris qu’ils devaient me protéger de mon frère.
J’étais en train de reprendre goût à la vie quand une gentille assistante sociale de Capdenac a insisté auprès de ma mère pour me placer dans un centre héliomarin à Biarritz.
Hélas, sans le savoir, j’allais à nouveau remettre mes pieds dans l’enfer des hommes !
Mais cela relève d’une autre aventure beaucoup plus dure et surtout effrayante !

La maîtresse d’école psychorigide! Afficher la pièce jointe 39336
Il y a des signes de vie qui sont lourds à porter !
Les moments du passé qui ne s'oublient pas
Et Didier ?
Bisous
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lilasys

Maître Poète
Centre Helios-marin de Biarritz 1962

La maison du rachitisme le Pearl Harbor français à deux pas de l’océan.
Centre hélios-marin pour enfants de deux ans à douze ans !

Mon devoir d’homme vieillissant m’oblige à vous raconter ce que fut au début de la cinquième république, la souffrance d’enfants placés dans le centre hélios-marin de Biarritz.
Les plus jeunes étaient âgés de deux ans à six ans, les plus âgés de sept ans à douze ans.
Les petites victimes étaient placées dans cet établissement dans le but précis de leur faire prendre du poids !
La fondation agréée par le ministère de la santé paraissait bien belle vue de l’extérieur, malheur à l’être innocent sans défense qui s’aventurait à l’intérieur !
Je raconte mon histoire, enfin ce dont je me souviens, car la principale préoccupation du pouilleux, crasseux et chétif que j’étais devenu en rentrant chez-moi après de longs mois de détention, fut d’éclipser de ma mémoire à jamais, cette très mauvaise expérience briseuse de jeunesse !
Ils sont légion ceux qui ont souffert à deux pas de l’océan, sans avoir eu le plaisir de profiter de ses bienfaits !
Les vagues chargées de larmes inlassablement frapperont leur âme meurtrie à jamais !
J’ai pu récupéré grâce à un ami les pages du premier procès à l’encontre du président fondateur de ce lieu maudit qui a eu lieu avant les années cinquante.
Monsieur E. Mendelssonh a remis le couvert moins de deux décennies plus tard !
La similitude des faits reprochés par rapport à mon expérience malheureuse est
frappante !
Croyez bien que je pèse ici mes mots et l’ensemble des petits pensionnaires qui ont témoignés sur un forum hélas aujourd’hui supprimé va bien entendu dans mon sens.
Quand on déracine et que l’on affame un petit être innocent et qu’on le frappe journellement, on détruit sa vie !
Le joug de l’enfance est parfois fait d’angles vifs et l’on a beau secouer nos frêles têtes des blessures profondes viennent blesser pour toujours nos âmes aux ailes fragiles.
J’avais à peine plus de dix ans quand suite à une hospitalisation, une gentille assistante sociale de ma région, insista auprès de ma maman pour je sois placé dans un centre hélios-marin.
Situé en bordure de
l’océan j’allais profiter du bon air marin chargé d’iode aux multiples bienfaits !
C’est donc le cœur serré mais néanmoins heureux à la simple idée que j’allais enfin découvrir cette vaste étendu d’eau salée, qu’avec ma mère je prenais le train en direction de ce lieu qui allait à jamais transformer mon esprit !
Le trajet me parut long, interminable même, l’éloignement de ma terre natale me laissait songeur ma gorge se nouait par moment, un flux de salive suivi de paroles rassurantes de ma maman me permettait d’anesthésier cette angoisse naissante que je n’avais jamais ressentie auparavant !
Il fallait pourtant suivre ce chemin, c’était pour mon bien, est-il une chose plus précieuse que la santé je vous le demande ?
Nous étions au début des années soixante prônées par nos politiques, la cinquième république naissante était dirigée par le grand Charles De Gaulles.
Alors, vous allez penser Maurice n’a absolument rien à craindre tout va bien se passer !
Je tenais toujours solidement la main de la très brave femme qui m’avait mis au monde, quand je suis arrivé sur le lieu même de mon incarcération mais évidemment je ne le savais pas encore !
La bâtisse était immense, située en bordure de l’océan mon âme rêveuse voyageait déjà au dessus des vagues qui se déchiraient en grands fracas non loin d’une plage aux sables éternels.
Tout me paraissait grand il n’y avait aucun doute j’allais vivre des jours heureux !
Quelques marches encore me séparaient de la liberté que je quittais sans le vouloir mais surtout sans le savoir !
D'ailleurs ma chère maman aurait si elle avait su dans quel guêpier elle me conduisait fait demi tour sur le champ, elle qui avait sauvait en les sortant des rangs de la déportation à Figeac, deux jeunes enfants au nez et à la barbe de la célèbre par ses exactions division Dass Reich !
Elle n’avait pris ce jour là qu’un risque, celui d’une simple balle dans sa tête.
Mais revenons à notre histoire !
Un dernier escalier à gravir nous a conduit dans un grand hall où était disposé de beaux meubles, un joli canapé et une télévision que je voyais pour la première fois !
« Tu vas être bien ici Maurice, oui maman ! ».
Une charmante dame très bien habillée s’est avancée vers nous.
« Je suppose qu’il s’agit de Maurice notre futur petit pensionnaire ? ».
« Il a l’air bien mignon, nous allons bien nous occuper de lui ! ».
Ces phrases ont fini par me convaincre de la nécessité de ce long voyage, je lâchais la main de ma mère pour la serrer encore une dernière fois dans mes petits bras.
Est arrivé ce moment, qui dans ma vie a marqué pour toujours mon impuissance à retenir les personnes que je j’aime.
Ma mère allait me quitter de longs mois pour mon bien !
On doit bien trouver une raison à une séparation douloureuse quand on est un tout petit bonhomme.
J’étais malade, pourtant je me sentais bien dans mon corps j’avais passé plus d’un mois dans une clinique où l’on me faisait des transfusions journellement, je ne pouvais être que guéri !
D’ailleurs à la fin de mon hospitalisation je parcourais tous les couloirs en chantant, j’étais connu et apprécié des malades !
Qui ne connaissait pas Maurice ?
La mère de Charles Boyer l’acteur qui résidait en permanence à la clinique était devenue ma troisième grand mère, ma confidente, j’allais voir les films où sont fils jouait dans sa chambre et elle était très fière de me dire ...« regarde ! regarde ! Maurice c’est Charles mon enfant, tu vois comme il est beau ?».
Il faut croire que dans l’existence les bons moments sont vraiment éphémères, j’allais l’apprendre après ce bref passage au Paradis.
La gentille assistante sociale avait tellement insistée que ma maman s’était laissée convaincre!.
L’heure n’est plus aux regrets, elle est à la séparation une main ferme me fit comprendre dans qu’elle direction je devais me diriger !
Les larmes envahissaient mes yeux et je suis certain que le regard de ma mère était voilé aussi, même si elle s’était montrée très rassurante jusqu’au dernier moment cette femme unique, si belle, si admirable !
Je suivais Maïté sans le savoir une basque à la voix forte, à la main rugueuse et lourde !
Je descendais au sous sol du grand et beau bâtiment flambant neuf.
Une porte pleine s’ouvrit donnant sur un espace sans ouverture, où une douzaine de tous petits lits en fer et à barreaux étaient alignés.
Des enfants étaient là, silencieux, ils me fixaient du regard !
« Installe toi ici ce sera ton lit, mets tes affaires dans cette armoire ! ».
Elle quitta ce que je dois appeler une cave qui sentait le renfermée bien loin du bon air marin que l’on m’avait promis.
« Salut le nouveau tu viens d’où ? ».
Je m’évertuais à répondre à des questions qui fusaient, alors que je n’avais qu’une envie celle de m’isoler pour pleurer.
Mais j’étais un rude je n’allais montrer mes faiblesses.
Fatigué par ce long voyage je m’allongeais enfin si je peux m’exprimer ainsi, sur un tout petit lit conçu pour un enfant de quatre à six ans, moi qui était dans ma onzième année.
La position idéale était celle du chien de fusil, en prenant soin d’éviter quelques ressorts qui visiblement n’avaient pas supporté l’épreuve du temps.
Je me suis endormi rapidement et j’ai été réveillé presque aussitôt par une volée de coup de balais qui atterrissaient sur moi dans tous les sens.
Chaque petit lit a eu droit à sa ration, peu de temps après j’ai entendu des petites voix me demander :
« Elle t’a frappé toi aussi le nouveau ? ».
Oui !….« il faudra t’y habituer ce sera comme ça tous les soirs !».
Avant d’aller plus loin je veux vous faire part de la souffrance morale de l’enfant déraciné dans ces conditions !
Je n’avais pas à me plaindre par rapport à d’autres gamins, j’étais déjà grand je reviendrai plus tard sur un fait qui m’a le plus marqué quand je l’ai appris !
Je n’ai aujourd’hui qu’une pensée émue en tête, celle des bébés qui ont vécu cette atrocité agréée par la sécurité sociale !
Merci aux services de la Dass il ne s’agisait pas là d’enfants abandonnés, mais de petits êtres adorables avec une maman et un papa qui les aimaient de tout leur cœur et surtout de toute leur âme et qui subissaient sans défense ces atrocités !
Comment a t’on pu séparer des bébés de leur maman ?
Je n’arriverai jamais à me l’expliquer !
Je vous direz plus tard comment j’ai appris qu’ils étaient prisonniers dans ces murs eux aussi !
J’ai eu une enfance rendue difficile, mais ma mère et mon père m’aimaient.
Je vivais dans une petite ferme très modeste mes parents étaient pauvres cependant la chaleur humaine était bien présente et l’on ne manquait de rien.
Le peu d’habits que nous possédions étaient journellement lavés à la main par la mère et les chaussures étaient cirés tous les matins avant notre départ à l’école, bref nous étions propres et pas malheureux à cette époque !
Le choc psychologique fut cependant important en intégra ce centre, je n’étais pas un enfant difficile cela m’a servi, par contre j’étais très attaché à mon environnement à l’amour parental qui est sûrement la plus grande richesse que l'on puisse espérer dans sa prime jeunesse.
Ici, tout s’effondrait une seule idée me revenait en tête nourrissant une angoisse perpétuelle je voulais rentrer chez moi pour ne plus avoir à souffrir, pour retrouver les miens les serrer très fort dans mes petits bras, revoir mes chiens, mes chats, et tous les animaux de la ferme ils étaient sûrement malheureux eux aussi de ne plus me voir !
Les minutes sont alors semblables à des heures, les heures aux mois, les mois aux années !
Tout s’effondre, la solitude chez l’enfant est immense elle ne ressemble à aucune autre, elle ne se domine pas, on ne s’y habitue jamais, elle nous ronge à petit feu !
Mon premier réveil fut très pénible, je ne peux pas vous le décrire il est inscrit dans mon âme comme une plaie qui ne cicatrisera jamais !
Je devais rester de longs mois, je commençais mon séjour et heureusement que je n’avais aucune notion du temps par rapport à mon ignorance scolaire !
Une "maman" basque arriva, c’est comme cela qu’on devait les appeler, vous savez celle que l’on a pas envi de peloter !une rude, une pure, une solide à la main noueuse rapide comme l’éclair !
Je passe bien évidemment sur la toilette matinale qui n’existait pas, j’ai le vague souvenir d’une douche commune prise durant la première partie de mon emprisonnement.
Toujours dans le sous sol j’allais prendre mon premier petit déjeuner !
A vrai dire c’était un breuvage infect, certains nouveaux étaient réticents dégoûtés à la limite du vomissement, et ce n’était pas parce qu’ils faisaient les difficiles je vous demande de me croire !
« Mange me lança un de mes camarades, il faut que tu manges !».
Je n’ai pas faim, j’ai l’estomac noué !
Mais il fallait bien faire ce gros effort j’ai fini par m’exécuter dans une seule gorgée.
J’ai vu des enfants refuser de se nourrir pendant deux jours, les plus anciens s’arrangeaient pour que la surveillante ne s’en s’aperçoive pas , mais la faim finit toujours par être la plus forte et persuade les estomacs les plus réticents !
A midi et le soir les repas toujours semblables nous étaient servis, il n'était pas rare de trouver notre ami préféré le cafard dans une de nos assiettes !
De très grosses boîtes de conserves d’environ cinquante kilogrammes sans étiquette garnissaient les poubelles m’a raconté ma mère, elle avait eu la curiosité de soulever un couvercle le jour où elle est venue enfin me libérer.
Des pattes mélangées aux lentilles en omelette, enfin des cocktails surprenants immangeables aux odeurs repoussantes composaient le plat unique et principal servi régulièrement matin et soir.
Mais on s’encougeait il fallait bien finir son assiette quoiqu’il arrive c’’était devenu notre mission.
Il fallait reprendre du poids à tout prix !...on ne quitterait la fondation qu’à cette seule condition, d’ailleurs nous étions arrivés dans ce seul but, reprendre du poil de la bête !
Et des bêtes nous étions devenus !
La pire des épreuves nous l’avions en milieu d’après-midi on nous obligé à boire ce qui était censé être du lait !
Je connaissais le goût bon lait de ma chère vache Flourette !
Là, seule la couleur blanche pouvait nous laisser croire un instant que ce breuvage en était !
En bouche notre seul recours était d’avaler le plus rapidement possible ce liquide pour éviter les retours amers !
Certains enfants (les durs) se sacrifiaient pour leur petits camarades qui ne pouvaient absolument pas ingurgiter ce médicament !
Étais-ce justement une potion à effets secondaires ?
Je ne le saurai jamais !
Ah !…ne croyez pas que l’on ne se marrait pas !
On ne manquait pas d’idées le matin on avait quartier libre dans la cave.
Notre jeu favori consistait à capturer les bestioles qui crapahutaient sur le sol.
On avait là une superbe réserve de cafards à portée de main.
Les rongeurs se méfiaient de nous je trouvais cela bizarre, contrairement aux cafards bestioles stupides, rapides mais pas autant qu’il l’aurait fallu !
Les rats qui pullulaient près des grosses poubelles je les trouvais sauvages par rapport à ceux de ma chère campagne natale.
Je vais vous raconter d’ailleurs une petite anecdote bien réelle pour me soulager un peu l’esprit, mais surtout pour revenir dans mon pays au début des années soixante et de respirer le bon air de ma campagne natale !
Avec et ma mère et mon père nous nous étions rendus au moulin chercher un peu de farine.
Chaque ferme ou presque avait son four à pain et mon père donnait sa récolte de blé à moudre au brave meunier du coin.
Et c’est là, que j’ai vu le plus de rats de ma vie, Ils crépissaient les murs du moulin.
Même mon chat aujourd’hui n’en reviendrait pas !
Pour me rassurer le meunier en attrapa un par la queue, l’animal n’a eu aucun mouvement de défense et il le balança dans le remblais en contrebas !
« Vous boirez bien un café ?». Je n’ai pas eu le temps de dire à mon père et à ma mère : non! non !…que notre broyeur de grain allait ordonner à sa brave femme :
« Prends le balai et fait sortir les bestioles de la cuisine !».
Elle pénétra dans la pièce et à grands coups de manche elle fit sortir une bonne vingtaine de rongeurs bien portants.
Je me souviens d’avoir attendu les jambes levées une fois à l’intérieur de la pièce, afin d’éviter quelques rongeurs qui avaient esquivé la sortie et qui circulaient sous la table.
Tout cela pour vous dire que le rat est très intelligent et sociable à l’image d’un chat lorsqu’il vit en compagnie de l’homme.
Cette scène je ne l’ai jamais vu dans un film.
Cela me ramène à Biarritz impossible de choper un rat pour jouer avec lui, par contre les cafards étaient nos amis et insectes préférés.
On les remuait dans tous les sens avec nos petites menottes que l’on ne lavait jamais et bien vous n’allez pas me croire nous n’étions jamais malades !
Nous avons inventé du moins on le croyait la course de cafards !
Un jeu qui nous occupait et nous faisait rire aux éclats, vous me direz il faut peu de chose pour amuser les gosses et c’est vrai !
Nous organisions des compétitions hippiques non épique !
C’est quelques années plus tard en regardant un film culte que la télévision diffusait chaque année ou presque "les trois chevaliers du Bengale" que face à moi les acteurs prisonniers dans un cachot jouaient avec les cafards de la même manière que nous !
Incroyable non ?
On nous permettait aussi d’aller dans une arrière cour à l’abri des regards, il y avait là une très vieille balançoire pas discrète elle grinçait très fort et le but de notre amusement était de monter à une hauteur vertigineuse à la limite du demi tour.
On nous amena un jour à l’océan à notre grande surprise !
Nous avons eu l’autorisation de tremper nos pieds dans l’eau !
Une autre fois mes camarades et moi nous sommes tombés sur un rocher sur la plage couvert d’escargots, un copain nous a dit : « ils sont bons à manger » et bien croyez-moi ils n’ont pas eu le temps de sortir les cornes !
Je vais vous parler d’une journée bien particulière !
Bien que présent dans ce centre mes copains de cave, apparemment étaient comme moi je n’ai jamais remarqué chez eux le moindre souci pouvant laisser supposer la nécessité de leur présence dans ce lieu maudit !
Aujourd’hui je me dis avec beaucoup de recul que la mafia était bien en place en ce début de cinquième république !
Mais cela n’est pas un scoop !
Les enfants de la Réunion ont souffert de cette politique de déracinement immonde !
Un jour, j’ai eu le malheur d’avoir mal à une dent vous savez à quel point on souffre dans cette situation !
Mais comment faire comprendre à la basque à la main rugueuse que mon cas était urgent !
J’étais un douillet un simulateur je faisais tout pour me faire plaindre, mes braves copains avaient beau me soutenir elle s’en foutait royalement !
Après de longs jours de souffrance elle décida enfin d’en toucher un mot à la Direction Mendelssonh...
La décision de me conduire chez un dentiste en ville fut enfin prise.
Ce fut seule fois dans mon long séjour j’allais m’absenter de la cave pour une ballade dans la superbe ville balnéaire !
Après avoir décapé très sommairement mon enveloppe charnelle puante (je ne me souviens pas d’avoir pris une seule douche pendant mon séjour) j’étais couvert de petites bestioles gratte tête que l’on appelle des poux j’ai mis ma tenue de sortie Madame Mendelssonh en personne se chargea de me conduire chez le praticien son mari.
C’est ce que j’ai appris bien plus tard il était chirurgien dentiste.
Elle conduisait dans le centre de Biarritz lorsqu’elle grillât un feu rouge.
Un coup sifflet retentit aussitôt sans se démonter ni ralentir, elle lança à l’agent : «je n’ai pas le temps vous nous enverrez la note ! » et cela en continuant sa route.
Moi je m’en foutais il me tardait d’arriver chez mon sauveur après tout il y avait urgence !
Installé confortablement il décida de m’extraire la dent moi qui ai des dents relativement bonnes encore aujourd’hui je suppose que cela devait être une dent de lait ?
Bon, elle ne me fera jamais plus mal !
Ils parlaient et il lui dit :
«Tu peux m’amener les enfants filles ou garçons je suis sûr que je leur trouve deux ou trois caries !».
C’est là que j’ai enfin réalisé que nous n'étions seuls !
Comment imaginer qu’après de longs mois, nous n’avions ni croisé ni aperçu d’autres enfants filles ou garçons âgés de deux à douze ans ?...
Aucune âme qui vive à part nous les pestiférés !
De retour dans les entrailles de l’immense domaine j’en parlais à mes camarades.
Non, non, nous sommes seuls !
On entendait bien quelques cris stridents qui perçaient la froideur de la nuit parfois mais rien nous laisser supposer que des bébés occupaient non loin de nous ce sous sol lugubre !
Puis, arriva cette journée, la mégère de service nous dit : «dépêchez vous on va se cacher il ne faudra pas parler, c’est un jeu il y aura une récompense !».
Elle nous conduisit dans une cave encore plus obscure ferma la porte à clef et dans un silence à faire froid dans le dos nous sommes restés là, terrés.
Après de longues heures une personne frappa à la porte.
C’est bon !
Nous attendons toujours la récompense !
Enfin si, elle allait faire son apparition sous une forme que nous n’attendions pas !
Quelques semaines avant mon départ on allait enfin quitter le trou à rats et nos camarades de jeu les cafards.
On allait prendre nos quartiers dans un beau dortoir avec de grands lits tout était beau à mes yeux, les toilettes une salle de bain neuve, et surtout les personnes qui s'occupaient de nous étaient gentilles nous avions droit à autant de bisous qu’on le souhaitait le soir avant de nous endormir !
Le réfectoire était grand la nourriture meilleure, mais que s’était il passait ?
Je l'attribue aujourd’hui à un contrôle officiel
sévère qui a fait prendre conscience à la direction qu’elle devait changer de méthode !
On voyait d’autres enfants filles et garçons la vie château nous tendait enfin les bras !
Nous avions l’autorisation d’écrire à nos parents mais nos lettres étaient lues !
Je me souviens, j’écrivais phonétiquement moi le presque illettré je rentrais dans ma douzième année quand même !
J’étais le chouchou d’une monitrice, elle venait à mes côtés lorsque je faisais la sieste et me couvrait de bisous !
Malheureusement le jour de ma libération est intervenue presque aussitôt !
Avec ma mère, j’étais sur le chemin du retour heureux enfin de la revoir de retrouver ma maison, mon père, mes frères, mes chiens, mes chats et tous les animaux de la ferme.
Je n’ai jamais dis un mot de mon séjour carcéral à mes parents j’ai tout fait pour occulter de ma mémoire ces longs mois de maltraitance pour ne me souvenir que des quelques jours heureux qui ont précédés mon départ !
Je précise que je n’ai jamais rencontré ni vu les bébés présents dans la fondation.
Je connais, Danièle elles ont témoignées de leur calvaire, elles avaient deux à trois ans lorsqu’elles furent séparées de leur famille et prisonnières des sous sols du centre hélio-marin.
Elles ont pu se remémorer leur supplice grâce à l’hypnose.
Danièle est aujourd’hui psychologue, je la contacte de temps en temps au téléphone.
Elle m’a rapporté, qu’elle avait beaucoup maigri durant son séjour et que dans le train qui la ramenait chez elle, elle répétait en boucle à sa maman : « Pas la dame qui me donne des gifles ! ».
Elle se souvient d’être attachée sur son lit !
J’ai pu sauver le témoignage de beaucoup d’enfants qui ont connu cet enfer à deux pas de la mer, ils sont très émouvants à la limite du supportable !
Il faut du courage croyez-moi pour écrire sur un sujet qui a torturé votre esprit d’enfant !.
Je termine cet écrit épuisé !
Je te lis et il me semble lire "mon HISTOIRE""
Combien sommes nous à avoir vécu cet enfer sans fin ?
Encore aujourd'hui je ne m'explique pas "POURQUOI" avons nous été traiter de la sorte !
Comme tu dis des souvenirs terribles qui sont toujours dans nos têtes et corps !
Personnellement j'étais au centre hélio marin de Capbreton mais le schéma est le même ...
Merci pour ce témoignage touchant pour ne pas dire affreux !
Bisous
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lilasys

Maître Poète
Les vieux pieds de vigne de Loupiac presque définitif ! Afficher la pièce jointe 39354

Il existe des petits coins de France où les traditions se perdent hélas !

A Loupiac, l’endroit le plus propice aux rencontres entre gens du pays se faisait naturellement au bistrot. Chacun avait sa petite anecdote à raconter et évidemment même si on ressassait souvent les mêmes rengaines, c’était toujours avec le même plaisir que l’on tendait l’oreille pour les écouter autour du bar après quelques tournées au bon vieux rouge ou blanc des coteaux environnants et un bon château Loupiac c’est quand même quelque chose n’est-ce pas ?
Ce soir-là, en guise d’amuse-gueules allait retentir l’aventure du Gabriel et du Jantou, une sacrée rigolade allait s’en suivre.
En tout début de soirée on avait déjà évoqué pour chauffer l’ambiance, le fameux jour où lors de l’enterrement du pauvre Louis, un très gros pavé lancé avec force était tombé dans la vasque du bénitier au premier rang de l’église, baptisant généreusement une deuxième fois, une grande partie des grenouilles en pleurs. Cela fera partie d’une autre histoire, toujours est-il qu’elle avait permis au conteur de service de se remémorer celle que je vais vous relater maintenant.
Le fait divers qui va suivre, a entretenu les rires bien après qu’il se soit déroulé dans les foyers du grand secteur de Causse et Diège lors des veillées autour d’un bon feu de bois.
Lorsque notre brave Gabriel rentrait du boulot il croisait régulièrement "le Jantou" installé dans son automobile qui devait dater de la dernière guerre, et régulièrement ce chauffard restait en phare alors que la nuit plombait déjà largement le secteur !
Il décuvait au volant car il respectait à la lettre la recommandation du ministère de la santé de l’époque, qui préconisait à un travailleur de boire au moins un litre de vin du pays par jour!
Cette phrase était affichée un peu partout dans les lieux publics et de transport de passagers, Jantou la connaissait par cœur et retenait surtout la mention sans équivoque !« au moins !» aussi l’appliquait-il à la lettre, croyez-moi sur parole.
La même mesure était également mise en avant pour le bienfait du tabac !. Enfin vous l’avez compris le mot d’ordre était : « tous engagés pour soutenir la viticulture et l’agriculture de notre belle région ! ».
Notre Jantou finissait toujours sa terrible journée dans le bistrot de la Marcelle avec les éternels habitués du coude levé.
Voici en quelques phrases comment a commencé cette histoire.
« Milla diou s’exclama le Gabriel je prends tout le monde à témoin ! je vous fais le pari de trois tournées gratuites, que si le Jantou me remets les phares en pleine tronche comme il a l’habitude de le faire presque tous les soirs je lui fonce dessus !».
« T’as que de la gueule, tu ne le feras pas reprirent en cœur les piliers de comptoir !».
« Et bien, c’est ce que l’on va voir ! »
Le Jantou qui bien entendu était présent a immédiatement pensé : « il est con, mais pas à ce point quand même !» tout en se réjouissant déjà de picoler gratuitement peu de temps après !
Le soir de la rencontre tant espérée ne tarda pas, alors qu’il roulait tranquillement Gabriel vit arriver face à lui, feux de route enclenchés l’animal à abattre !
Enfin, c’est ce qu’il pensa, et profitant de l’aubaine sans hésiter une seconde les bras crispés sur son bolide il se dirigea droit vers sa cible !
Il ne le savait pas encore, mais il allait être victime d’un double choc !
Les véhicules s’arrêtent net dans un fracas de tôles assourdissant.
Gabriel était fier de lui, son pari désormais en poche !
A peine fut-il remis de cette intense émotion, il se dégagea de l’épave et vit face à lui deux lumières vives qui le fixaient avec insistance en plein visage !
Qu’avait-il donc fait au bon dieu pour que tant de rayons lumineux de fortes intensités s’acharnent ainsi continuellement sur lui ?
Il comprit presque aussitôt et tout en se grattant la tête, il aligna ces paroles qui restèrent à jamais gravées dans la mémoire collective des habitants du village, tant elles sont appropriées à la situation imprévue !
« Aqueth còp si èi pas tròp lusit ! »
« Ce coup si je n’ai pas trop brillé !».
En effet, face à lui deux pandores
du coin se rapprochaient afin d’entretenir un brin de causette !
Il leur expliqua bien évidemment sans se démonter une seconde, qu’il avait été ébloui par les phares de leur voiture !
On a beau être assermenté on se doit avant tout de respecter le code de la route n’est-ce pas ?
Ils lui demandèrent dans la foulée s’il avait bu ? Visiblement après quelques exercices physiques appropriés afin de détecter l’alcoolémie du chauffard suspecté, par un miracle que je ne saurais vous expliquer ce jour là, Gabriel était resté sobre comme un chameau.
Étais-ce dû à une petite cure de désintoxication en prévision du froissement de tôle pour ne pas rater sa cible ?
Les gendarmes n’ont cependant pas reconnu leur tort et l’ont assigné à se rendre devant un juge au tribunal de Rodez, pour expliquer son étrange comportement !
Le jour J, notre homme droit dans son costume en velours trois pièces, montre gousset en poche, expliqua que la voiture officielle était arrivée face à lui en l’aveuglant à la manière d’un soleil rasant un matin d’octobre et qu’il n’avait rien pu faire pour l’éviter !
Le jugement a été prononcé sur le champ son explication ayant été suffisamment convaincante aux yeux de la magistrature.
Gabriel est donc ressorti blanchi de l’accusation injuste stipulée dans le procès verbal !
Quand on dit qu’il n’y a pas de justice dans notre pays on se trompe lourdement, notre poivrot vient à l’instant de vous en apporter la preuve formelle !
On n’a jamais su au pays si les agents avaient été réprimandés pour faux en écriture !
Lorsque vous passerez à Loupiac dorénavant, vous aurez je l’espère un autre regard sur l’ancien petit bistrot de la Marcelle.
Le pauvre Gabriel malgré sa bonne volonté n’a pas eu droit aux trois tournées gratuites, la cible touchée n’ayant pas été la bonne, il a du s’exécuter et payer sa dette !
Malgré ce manque de chance évident dans un élan de générosité que tous les habitués du troquet lui connaissaient, pour asseoir sa réputation de pilier de comptoir éternellement , il a laissé une coquette somme d’argent à la patronne, afin que l’ensemble des pieds de vigne les bras accoudés au comptoir puissent le jour de son enterrement trinquer et porter plusieurs toasts à la santé de son âme, tout en racontant n’en doutons pas un instant le petit récit que je viens de coucher sur cette page.
Quant à notre brave Jantou, il a remercié chaque jour le seigneur de sa bienveillance en propulsant Gabriel miraculeusement dans les bras des forces de l’ordre.
L'abus d'alcool est mauvais pour la santé ?
Tu parles! Avant les vieux picolaient et ils étaient aussi frais que des gardons !
Que foutent ils dans l'alcool pour rendre aujourd'hui les gens malades ?
Un plaisir de te lire vraiment;
Tu es un conteur hors pair !
Bisous
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lilasys

Maître Poète
Afficher la pièce jointe 39353 Le début de ma vie, au bord du Lot au port de la Madeleine.

Version définitive !

Je vais essayer de vous brosser en quelques lignes un tableau de ce que fut mon début de vie au port de la Madeleine en bordure du Lot dans les années cinquante et cela, même si vous n’en avez rien à faire !
Cela n’a rien avoir avec la Madeleine de Proust pour vous aiguiller ainsi nous gagnerons du temps !
Pour ceux qui par hasard ne me lisent pas et qui tombent sur ces lignes guidés par je ne sais quel instinct je vais vous résumer l’histoire de ce lieu qui comme l’écriture qu’enfante mon crayon ne paie pas de mine, mais qui par magie sait dévoiler son âme à celui qui tente de s’y intéresser.
Le port fluvial a en effet été le témoin privilégié de nombreux passages depuis l’Antiquité.
Des Romains au temps de la Guerre des Gaules jusqu’à moi l’eau pourrait nous chanter tout ce que son miroir a pu absorber puis refléter pendant ces longs siècles.
C’est pour vous éviter une démarche compliquée vers cet élément limpide qui n’aura pas forcément envie de vous livrer ses secrets, que je vais en bon riverain qui se respecte vous rapporter ces mots.
La voie romaine débouchait au pied du débarcadère, ce fut donc un passage obligé pour tous les illustres personnages qui voyageaient, et contrairement à ce que l’on pense nos aïeux passaient beaucoup de temps sur les chemins caillouteux de France et de Navarre.
Cela me conduit inévitablement à commencer par le premier que relate les livres d’histoire en pays d’Olt.
Je veux parler du célèbre et futur Henry IV roi de Navarre. Nous étions-vous n’allez pas me croire en période agitée et notre bon roi Henri ne traîna pas longtemps dans les parages. On raconte cependant qu’il s’arrêta un moment au passage pour se reposer et sûrement pour déguster une bonne poule au pot. Cette dernière précision, vous la devez à votre serviteur qui par moments, a un peu d’imagination.
Puis par ordre chronologique ce fut au tour de Louis XI qui avait entendu parler des fameux miracles de Rocamadour. L’histoire ne nous dit pas si, face à sa majesté la Vierge noire a exaucé ses demandes ce jour là. Pour les plus férus qui souhaitent approfondir ce pèlerinage royal, je donnerai des renseignements plus précis sur cette journée exceptionnelle.
Ce fut ensuite le tour de Louis XIII en compagnie de Richelieu. Les notables de la région s’en furent l’accueillir rapporte le responsable de la Dépêche du midi de l’époque, au port de la Madeleine. C’est là que les discours de bienvenue furent prononcés, il ne fallait pas froisser les clans, Religieux et bourgeois du pays étaient tous là vous vous en doutez !
L’un d’entre-eux, un nommé Paillasse, remarqua que Richelieu lorgnait longuement en direction de la place forte d’Uxellodunum. Dès lors, la décision de désarmer la place fut prise !
Les pauvres habitants de Capdenac-le-Haut ont dû obstruer la fontaine de Jules César.
Une brave centenaire, au début des années soixante, nous disait : "Le Roi a dormi chez vous". Même si je n’ai pu malgré mes recherches confirmer ses dires, il plane quand même une certaine certitude à ce sujet.
Son départ du port fut un triomphe une double haie d’honneur jusqu’à Figeac était présente, avec des «Vives le Roi retentissants qui gravèrent de leur empreinte les roches les plus dures du Quercy.
Mais je m’égare. Revenons au vingtième siècle au début des années cinquante retrouver le port à peu près tél que comme nous le connaissons aujourd’hui.
Je suis le quatrième enfant de la famille un robuste.
Nous sommes en 1958 j’ai six ans, je vis avec mes pauvres parents et mes trois frères dans une annexe de la bâtisse principale datant du 15 août 1668, sobre. Il s’agit de l’ancienne écurie du relais des diligences, elle a été transformée sommairement et composée de deux chambres et d’une cuisine.
Nous dormons à quatre dans le même lit !
Eh oui, il faut savoir partager savamment l’étroitesse du lieu et ma foi en période hivernale une agréable chaleur humaine est toujours appréciable!.
Nous disposons, pour vous dire que nous ne sommes quand même pas en situation de pauvreté extrême du chauffage central, il s’agit d’un vieux poêle à bois placé au centre de la maison!.
L’eau abondante nous allons la chercher au puits dans un seau de dix litres, je me souviens de sa chaîne qui se déroulait rapidement durant sa descente, la remontée à la manivelle était beaucoup plus laborieuse !
Dix litres du précieux liquide à tout faire qui au bout de mes minces phalanges déséquilibraient l’ensemble de mon corps surtout quand au dernier instant, il fallait hisser l’ensemble hors de la cavité sombre à l’écho lugubre.
Bien plus tard, vers la fin des années soixante nous nous sommes raccordés au réseau communal pour faire comme tout le monde, bien plus pratique. Ce grand pas vers la modernité nous a conduits inévitablement vers l’eau paiera !
Les commodités se trouvaient au coin de la basse-cour. près de la fosse à purin derrière la grange. Une porte en bois ajourée nous protégeait des regards indiscrets, quelques pages de vieux journaux bien pratiques étaient accrochés là en permanence, elles nous permettaient d’avoir accès aux anciennes nouvelles. En période hivernale le froid saisissait mes tendres fesses ; l’été, une multitude de mouches voletaient autour du trou béant aux effluves très caractéristiques, et parfois l’une d’entre elles s’aventurait au point d’explorer ma plus tendre intimité en me chatouillant !
Ma mère en grande courageuse, n’hésitait pas à braver toutes les conditions climatiques : une fois par semaine, munie de sa planche en bois inclinée, elle l’avait le linge et, et grâce à un bloc de savon de Marseille, nantie de gestes ancestraux calculés, savonnait puis frottait nos précieux vêtements les frappait en cadence pour enfin les rincer avant des les essorer. Une brouette en bois bien pratique attendait patiemment le précieux chargement. Suis-je l’inventeur de la multi-traction ?
La remontée n’était pas des plus aisées, même si avec le temps une trace indiquait la voie à suivre absolument.
Je me souviens de l’avoir aidée,en me mettant derrière elle, et en la poussant avec toute la force de ma faiblesse !
Ma grand mère paternelle habitait la maison de maître attenante à la notre c’était la patronne des lieux, elle savait nous le faire comprendre, elle était cependant gentille avec nous tout en jonglant avec son caractère étrangement espiègle.
Une grande cheminée trônait à ses pieds deux tisons de bois qui se touchaient à peine lui permettaient de se chauffer, une grande marmite contenant de la soupe était continuellement accrochée sur l’âtre flamboyant!...et elle jetait de temps en temps à l’intérieur de cette réserve parfumée tout ce qui lui tombait sous la main !
C’était une rude à cuire, comme on n’en voit plus, ou peu de nos jours. Elle passa le terrible mois de février 1958 où les températures oscillèrent entre moins quinze et moins vingt -six degrés toute la lune, la porte de sa cuisine s’ouvrait sur une très grande pièce au sol cimenté récemment victime de la modernité ambiante du moment. Elle avait trouvé ce moyen ingénieux pour éviter que la fumée n’ envahisse la pièce.
La nuit venue elle montait à l’étage où elle avait sa chambre, munie d’un galet de la rivière qui s’était réchauffé lentement sous la rare cendre, en effet pour éviter la surconsommation de bois en dehors de la cuisson. Elle avait une technique infaillible !
L’astuce tenait dans l’ art de positionner les bûches qui tête à tête se touchaient à peine !
Mais elle aussi fut victime du progrès qui commençait à germer dans nos campagnes, avec l’arrivée du gaz au début des années soixante. Elle me lança :"tu vois comme c’est pratique le gaz, Maurice, une allumette et hop, c’est de suite chaud, et surtout la nourriture n’a plus goût à fumée !".
Je me souviens de l’avoir souvent entendue dire en patois : « ce soir j’ai trois plats au dîner, la soupe, chabrot et au lit ».
Elle était néanmoins une grande cuisinière elle avait à son actif plusieurs années de restaurant, une toute petite affaire à l’entrée du pont nommée aujourd’hui Belle Rive.
Eh oui, il faut souvent, vous le savez commencer avec peu de moyens.
Mon grand-père était pêcheur d’eau douce professionnel, il louait une concession entre les deux chaussées du Lot construites pour le rendre navigable. Il allait vendre sa pêche à Figeac, où les restaurateurs lui faisaient bon accueil !…Perches, tanches, cabots, anguilles, carpes, gardons, et autres remplissaient sa charrette.
Marceline au restaurant les préparait et elle roulait souvent ses clients dans la farine comme les poissons qu’elle leur servait !
Le client se faisait souvent rouler dans la farine par cet espiègle personnage !
" Elle est excellente votre truite madame !"
En réalité il dégustait sans le savoir un bon cabot fraîchement pêché !
C’était la maîtresse de la basse cour, elle seule s’arrogeait le droit de gérer la volaille de la ferme !
Elle nous conviait à un bon repas à condition qu’on lui capture l’animal désigné par son doigt.
Inutile de vous dire que la bête n’avait aucune possibilité de nous échapper, le ventre creux favorise l’agilité !
La volaille aussitôt attrapée, elle la saignait en nous demandant de la tenir par les pattes, et on voyait la victime se vider de son sang dans une lente agonie.
Sang, qui était récupéré dans une assiette creuse où un savant mélange de persil et d’ail entre-autres allait permettre de concocter une excellente sanguette dont elle avait le secret !
L’eau bouillante était déjà prête elle plongeait alors la défunte bestiole à l’intérieur du récipient fumant et commençait à la plumer.
Une petite demi-heure après s’épanouissaient des parfums aux effluves divines, à faire frissonner les narines les plus délicates, et qui exaltaient mes sens conquis pour toujours !.
Savait-elle lire ?…De toute évidence, pour moi elle faisait semblant !
Elle marmonnait en remuant la tête de droite à gauche, sans jamais prendre le journal à l’envers. Cependant , il y avait déjà quelques images !
Née, en 1888, je suppose qu’elle n’était pas allée à l’école. Les enfants des fermes et les filles en particulier avaient des occupations bien plus importantes aux yeux de leurs parents car le travail autour de la ferme primait avant tout, ce n’était pas le moment de s’asseoir sur un banc face à un tableau noir !
Cela ne l’empêchait pas d’avoir l’intelligence vive, elle se moquait ouvertement de ma grand-mère maternelle en l’imitant dans sa gestuelle, et sa répartie était très aiguisée. Le frère de mon père professeur fut le meilleur élève du lycée Champollion.
Les parents de ma mère logeaient dans la maison du mendiant. Inutile de vous dire que le confort était cruellement absent.
Leurs toilettes se trouvaient au-dessus de la rivière, une construction digne d’un poilu de la première guerre. Ils nourrissaient ainsi la faune et la flore environnantes !
Mais peu importait, ils étaient près de leur fille, la misère les avait accompagnés toute leur triste vie. On s’habitue à tout, n’est-ce pas ?
Mon grand-père légionnaire nous racontait ce que fut pour lui et ses camarades le calvaire de la guerre 14 18.
Nous avions d’ailleurs souvent droit aux mêmes épisodes, mais qu’importe nous buvions ses paroles, et à six ans les horreurs qui succèdent aux horreurs se ressemblent toutes.
La pauvreté nous entourait, il faut bien le reconnaître cependant on ne pouvait pas dire que l’on était parmi les plus malheureux du pays.
De temps en temps les journaliers passaient nous voir, et pour un maigre repas ou un morceau de pain nous aidaient au travail de la ferme toute la journée.
Ma mère avait le cœur sur la main, un jour elle a préparé une couche de fortune mais confortable pour Carnus le miséreux qui dormait habituellement sur une paillasse.
Il avait deux phrases fétiches dites en patois:
Aquò rai çò qui mingi tot que hèi vente
« Peu importe ce que l’on mange!....Tout fait pour ventre ! ».
Que mingi quan n'i a, quan n'i a pas be me'n passi !.
Ou, « je mange quand il y en a, quand il n’y en a pas je m’en passe ! ».
Pour moi ces deux phrases m’ont aidé à avancer dans mon existence chaotique.
Le lendemain ma mère lui demande : « vous avez bien dormi Carnus ?».
Traduit du patois…
« Com un président ! ».
« Comme un président !».
Histoire touchante ! Nous avons vécu des moments similaires !
Ecrire pour toi doit être une propulsion de souvenirs ; Autant les penser, autant les écrire
Bravo pour ce moment de lecture
MERCI
Bisous
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CYPRIEN

Il était mendiant de son état, comme on est épicier, maçon, ou maréchal-ferrant.
A cette époque là, la mendicité n’était pas interdite, les riches n’avaient pas honte des pauvres, les pauvres ne rougissaient pas de leur indigence, ils n’enviaient pas leur richesse. La misère n’était pas rare, on pouvait être plus ou moins pauvres, on vivait ainsi sans en faire un scandale !
La misère n’étonnait personne, elle ne blessait personne, bien sûr je vous parle d’une époque depuis longtemps révolue.
En ces temps reculés, les vagabonds sillonnaient les campagnes. Les effluves du printemps comme par enchantement les sortaient de leur torpeur hivernale dans le coin d’une grange où ils se tenaient cois dans la paille ou dans le foin. La besace sur l’épaule, la barbe abondante, la bouche édentée, incultes, habillés de guenilles, ils partaient à la recherche de travail pour un croûton de pain, un verre de vin. "Où il y a du pain et du vin le Roi peut venir" disait un proverbe, et dans le temps on se contentait de peu.
Cyprien de mon enfance était si pauvre que je pensais qu’il n’avait jamais eu une mère et un père.
La mère de Cyprien est née sur un rocher troglodyte qui surplombe la vallée du Lot. Jamais je n’aurais imaginé enfant qu’il ai eu un père et une mère. Il s’appelait Cyprien et cela suffisait amplement à mes yeux pourquoi se serait-il embarrassait d’un patronyme ? Je ne vous cache pas ma déception quand j’ai appris qu’il avait des parents comme moi.
Sa mère l’avait initié à son futur métier de
mendiant, et tout petit il la suivait et l’imitait paraît il à la perfection.
Il représentait un tout, semblable à ces personnages bibliques qui se suffisent à eux même, il pouvait très bien n’avoir aucune généalogie, son existence n’aurait du souffrir d’aucune explication, c’était Cyprien, mon Cyprien, notre Cyprien le mendiant mythique du pays d’Olt !
Cyprien avait une tenue vestimentaire bien à lui, il avait pour habitude d’empiler sur sa carcasse les vêtements qu’on lui donnait, il avait l’allure d’un Vendredi tous les jours de la semaine !. Il superposait même les couvres chefs sur sa tête qui finalement ne paraissait pas dégarnie pour son âge !
D’ailleurs quel âge avait-il ? personne au pays aurait pu répondre précisément à cette question ! Lui-même le savait-il ?
Sa manière de se vêtir à l’aveugle avait l’avantage de libérer ses mains ce qui est essentiel pour un individu atteint de cécité et qui cherche sa route à tâtons, et qui en plus tend la main pour quémander un bout de pain.
Cyprien était un redoutable chercheur d’escargots du petit gris au bourgogne très peu avaient la chance de lui échapper même s’ils le voyaient arriver de loin avec leurs grandes antennes, l’inverse n’était pas vrai comme je viens de vous l’expliquer !. Il venait les proposer régulièrement à ma grand mère qui les mettait à dégorger dans une nasse au bord du Lot. Elle lui donnait alors quelques sous en échange, puis l’invitait à venir les déguster quelques jours plus tard, ces bestioles à cornes préparées à l’oseille étaient succulentes, c’était à notre tour de baver devant elles avant d’être copieusement servi !
A une personne du pays un jour d’automne Cyprien lança : «Vau castanar !»...je vais ramasser les châtaignes, elle moqueuse et « comment pourras-tu les trouver ?…tu oublies que tu es presque aveugle ? Il lui répondît du tac au tac en expert en la matière : « C’est avec les pieds que je les sens !».
L’itinéraire de Cyprien était tracé d’avance, il passait par Capdenac, où une fois il avait donné un très mauvais exemple, car habité ce jour là, paroles des gens du pays par l’esprit satanique ! Jugez-en plutôt !
Une fois qu’il était ivre mort, parce que des personnes mals intentionnés, lui avaient apporté du vin en abondance, et que tout le monde était inquiet pensant qu’il avait rendu l’âme, tant son attitude était immobile et figée, soudain, le voilà qui commence à remuer faiblement. Chacun pousse un ouf de soulagement et remercie le seigneur ! Soudain , Cyprien s’agite, son visage s’illumine, avec ce sourire si caractéristique aux aveugles : « Gara ! soupire t’il en extase. me caldrià una drolleta !». Maintenant il me faudrait une fillette ! Tous les témoins s’enfuirent scandalisés, mais rassurés sur le sort du pauvre hère.
Il se rendait tous les ans à la foire de la commune, il faisait l’honneur de sa visite au villageois, c’était à sa manière un prince en déplacement.
Personne n’aurait pensé qu’elle puisse avoir lieu sans lui !
L’annonce de son arrivée se répandait comme l’écho d’un son de clôche !
Les enfants à la sortie de l’école se précipitaient pour aller à sa rencontre.
Est-ce un signe, le jour où Cyprien a cessé de venir, la foire à décliné, puis a fini par mourir.
« Post hoc, propter hoc ? ».
Relation de cause à effet ou pure coïncidence, mieux vaut ne pas essayer de trancher.
C’était un homme important finalement, il siégeait près de la barrière à l’entrée du village. Assis sur les marches d’un calvaire de pierres qui lui servait de trône au carrefour de quatre chemins là notre Cyprien tenait conseil au milieu de sa cour d’enfants auxquels venaient se mêler quelques paysans goguenards descendant du Batut où se trouvait le foirail.
Cyprien eut une fin tragique, aussi douloureuse que celle de la Virgile son amour, la dernière fois que j’ai entendu parler de lui c’était par la voix de mon père qui a répondu à ma question : On ne voit plus Cyprien depuis longtemps, où est-il ?
Tu sais Maurice, il était âgé, il vivait dans une très vieille grange où un seul coin de toiture l’abritait, cet hiver il a voulu replacer quelques tuiles pour qu’il ne lui pleuve pas dessus et il a fait une chute mortelle.
On n’a rien retrouvé de lui à par quelques os, les rats l’avaient entièrement dévoré !
Ainsi finit la vie de Cyprien, le mendiant qui marqua de son empreinte de pauvre et de riche à la fois ma jeunesse.
 

Pièces jointes

Une journée de classe comme tant d’autres à Capdenac Gare au début des années soixante!.

La cour de récréation était au même endroit que celle que vous connaissez aujourd’hui. Quelques petits platanes l’agrémentaient et les instituteurs avaient pour habitude de la parcourir dans d’incessants et curieux allers-retours composés d’une marche avant et arrière. Ils discutaient entre-eux tout en surveillant les élèves qui jouaient. Un préau servait d’abri en cas d’intempéries et aux étourdis qui n’avaient pas appris la table de multiplication qui se trouvait au dos du cahier de brouillon, punition suprême pendant la récréation, avec celle du tour de la cour les mains sur la tête!. Une rangée de commodités turques aux portes pleines longeait le mur d’enceinte infranchissable. Bien entendu filles et garçons étaient dans des cours séparées, en ces temps reculés, l’éducation nationale ne prenait aucun risque!. On ne manquait pas d’imagination et intelligemment nous avions séquencé l’année par diverses activités. On ne manquait pas d’imagination et curieusement
nous avions séquencé l’année par diverses activités. La rentrée des classes autour du vingt septembre était consacrée aux billes que l’on achetait chez la Marinette, pas très loin de l’entrée de l’école Saint Louis. Le paquet de cent billes en terre avait une valeur marchande de cent francs, la bille était donc à un franc!.
Ça c’est pour vous montrer, que je suis bon en calcul mental aussi!…sourires
Les agates en verre aux reflets multicolores étaient à dix francs, il existait le boulard bien plus gros mais aussi la bille en plomb. Tout cela pour vous faire comprendre, que nous pensions avoir une fortune en poche. C’était le cas d’ailleurs et elles se mélangeaient souvent dans la poche de notre tablier avec les châtaignes grillées. Soit on attaquait une partie de triangle , soit on jouait au trou!. Alors des phrases magiques jaillissaient de nos petites bouches : point de dégouline…je vais te kuffer…enfin une suite de mots que nous comprenions tous, et qui nous permettaient
de passer un agréable quart d’heure. Nous entonnions les qui sait qui veut jouer au gendarme et au voleur?… ou nous attaquions une partie du fameux trappe trappe, le temps passait bien trop vite à notre gré!. Certains élèves étaient de corvée pour allumer le poêle à bois ou à charbon, afin qu’une agréable chaleur nous accueille quelques temps après que la grande cloche actionnée par une corde ne résonne le moment du rassemblement. En moins de temps qu’il me faut pour l’écrire, les rangs par deux se formaient dans un silence qui aujourd’hui paraîtrait surprenant!.
Devant la porte l’instituteur nous faisait signe de rentrer.
Deux ou trois allées séparaient des petits bureaux à deux places où un petit banc servait d’assise aux élèves.
L’odeur bien particulière de la salle de classe
emplissait nos narines.
C’était un mélange olfactif difficile à décrire, craie, encre, gomme, de cahiers et de
livres sans oublier l’unique chauffage central aux effluves boisées qui envahissaient le lieu d’études. À l’époque des machines à vapeur, nous étions habitués à ce type de confort qui allait croissant au fur et à mesure que le temps passait!.
Après que l’ordre nous eut été donné de nous asseoir un deuxième arrivait rapidement.
Sortez votre cahier du jour!.
Le maître alors, commençait la leçon de morale très importante à ses yeux.
Après nous avoir expliqué les règles d’une bonne conduite sur divers sujets de l’existence, il prenait la craie et dans une écriture faite de pleins et de déliés le tableau s’incrustait de ses bonnes paroles. Une fois la phrase moralisatrice en place, nous devions à l’aide de notre porte plume légèrement humectée dans l’encrier la recopier. L’écriture est un art de nos jours oublié, je vous invite à consulter les anciens registres dans nos mairies pour en saisir les formes subtiles.
Plume légère en montant puis accentuée dans sa descente, la lettre ainsi devient ainsi une œuvre admirable.
Les taches ne sont pas permises il faut beaucoup d’expérience et de doigté pour obtenir un bien ou le très bien tant convoité!.
Les uns après les autres, nous nous levons et toujours dans le plus grand calme, nous avançons vers la chaire et tendons le cahier ouvert à l’homme instruit.
Il nous demande si l’on a bien compris la morale du matin, et nous pose une ou deux questions, sa plume imbibée d’encre rouge parcourt les quelques lignes et en marge tombe par magie l’appréciation.
Le bonheur on le ressentait déjà dans un assez-bien, alors lorsqu’on atteignait le sommet de la récompense avec un très bien, inutile de vous dire la fierté que l’on pouvait ressentir!.
Ainsi passait la journée où le français côtoyait les mathématiques, avec ces fameux trains qui partaient en gare de Capdenac vers Cahors à une certaine vitesse, mais qui contrairement à la régularité exigeait par la SNCF à cette glorieuse époque, n’étaient jamais à l’heure, et il fallait bien entendu dire à quel endroit ils allaient se croiser!.
Ou on sortait l’ardoise pour du calcul mental!.
Heureusement la brave cloche fixée à une solide poutre et actionnée grâce une une chaîne par l’élève de service venait à intervalles réguliers nous délivrer de ces prises de tète incessantes mais au combien instructives.
Le repas de midi qu’avait avec amour concocté la mère Closel arrivait à point, et nous faisions notre possible pour lui être agréable en l’aidant dans son service, afin de pouvoir avoir accès à la réserve de petits beurre, évidemment nous nous remplissions les poches sans le lui dire!.
La nourriture n’était pas très appréciée je n’ai
pas touché un seul morceau de viande pendant toute ma scolarité, je n’étais pourtant ni végétarien ni hindou.
Je pourrai vous parler de l’odeur du réfectoire, tous les enfants qui l’ont connu en ont empreignait leur mémoire, curieusement ils ont tous la même senteur.
Pour ceux qui par hasard ne l’ont pas connue je ne peux la leur décrire, on ne peut que très difficilement parler de lumière à un aveugle!.
L’après se déroulait comme la matinée, mais notre plus grand bonheur venait encore de cette bonne cloche qui à quatre heures et demi venait tinter la délivrance!.
Elle était accompagnée de cris joyeux dès que l’on passait le portail en fer forgé, pour regagner nos foyers à bord des cars Laurens, du moins pour ceux qui n’habitaient pas notre chère petite ville.
 
Inclinons-nous devant la mémoire et le souvenir de nos parents, nos amis et nos camarades trop tôt disparus. Ils sont légion, ceux qui nous attendent , pressés de revivre parmi nous. Évoquer leur ombre au cours d’une réunion de famille, exprimer ce que l'on ressent pour les morts est une satisfaction ; c'est, ce semble, les serrer une fois de plus dans nos bras !
Comptons parmi les chagrins les plus redoutables de cette vie, celui de perdre les personnes que l’on aime, sans pouvoir vieillir encore plusieurs années ensemble et sans les retrouver lors des rencontres fraternelles autour d’une bonne table.
 
Dernière édition:
Version définitive !

Il faut une volonté surhumaine pour écrire, et tu n’es qu'un homme Momo !…me souffle Gustave !


Le centre hélio-marin à deux pas de l’océan, le Pearl Harbor Français des pauvres au début des années soixante… le paradis des riches ?

Centre hélio-marin de Biarritz : "La science et la conscience au service de l’enfance".
Voilà les mots que l’on pouvait lire sur le petit fascicule de présentation de l’établissement !

Mon devoir d’homme vieillissant m’oblige à vous raconter ce que fut au début de la cinquième République la souffrance de certains enfants placés dans le centre hélio -marin de Biarritz.
Les plus jeunes étaient âgés de deux à six ans, les plus âgés de sept à douze ans.
Ces petites âmes innocentes étaient au sein de cet établissement dans un but précis, celui de prendre du poids.
La fondation agréée par le ministère de la santé paraissait bien belle vue de l’extérieur, malheur au pauvre être innocent qui s’aventurait à l’intérieur !
J’essaie de me remémorer cette période car la principale préoccupation du pouilleux, crasseux et chétif que j’étais devenu après de très longs mois de détention fut d’effacer de sa mémoire à jamais cette très mauvaise expérience !
Ils sont légion ceux qui ont souffert à deux pas de l’océan, sans avoir eu le plaisir de profiter de ses bienfaits !
Les vagues pour toujours chargées en lourdes larmes inlassablement frapperont leur mémoire meurtrie !
J’ai pu récupérer, grâce à un ami, les pages d’un premier procès dans les années quarante à l’encontre du directeur fondateur de ce lieu maudit !
Monsieur le Directeur a remis le couvert en affamant et en maltraitant les pauvres petits pensionnaires moins de deux décennies plus tard !
La similitude des sévices infligés aux malheureux enfants qui lui étaient alors reprochés lors de cette condamnation, par rapport à ma malheureuse expérience est frappante !
Croyez bien que je pèse ici mes mots et l’ensemble des petits résidents qui ont témoigné sur un forum hélas aujourd’hui supprimé, va bien entendu dans mon sens.
En dehors des petits pensionnaires nantis d’une parenté aisée, qui eux vivaient au paradis deux étages au-dessus de nos têtes !
Je vais ici surtout vous raconter mon très long séjour dans les profondeurs du bâtiment.
Quand on déracine et que l’on affame un être innocent tout en le frappant journellement,
on détruit partiellement son existence !
Le joug de l’enfance est parfois fait d’angles vifs et l’on a beau secouer nos frêles épaules pour nous soulager des blessures profondes viennent meurtrir pour toujours nos âmes aux ailes fragiles.
J’étais dans ma onzième année quand, à la suite d’une longue hospitalisation, une gentille assistante sociale de ma région a insisté auprès de ma maman pour je sois placé dans un centre hélio-marin.
L’établissement était situé en bordure de l’océan, j’allais profiter du bon air du large chargé d’iode aux multiples bienfaits !
C’est donc le cœur serré, mais néanmoins heureux à la simple pensée que j’allais enfin découvrir cette vaste étendue d’eau salée, qu’avec ma mère je pris le train en direction de ce coin paradisiaque qui allait à jamais transformer mon esprit !
Le trajet me parut long, interminable même, l’éloignement de ma terre natale me laissait songeur, ma gorge se nouait par moment ! Un flux de salive rapidement avalé, suivi
de paroles rassurantes de ma maman, me permettait d’anesthésier cette angoisse naissante que je n’avais jamais ressentie auparavant !
Il fallait pourtant suivre ce parcours obligé, c’était pour mon bien.
Est-il une chose plus précieuse que la santé, je vous le demande ?
Nous étions au début des années soixante encensées aujourd’hui par tous nos politiciens. La cinquième République qui débutait à peine était dirigée par le grand Charles de Gaulle.
Alors, vous allez penser : « Maurice n’avait absolument rien à craindre tout allait bien se passer !».
Je tenais toujours solidement la main de la très brave femme qui m’avait mis au monde quand je suis arrivé au terme de ce très long périple.
Face à mes yeux se dressait une bâtisse immense, située en bordure de l’océan. Mon âme rêveuse voyageait déjà au-dessus des vagues qui se déchiraient en grand fracas, non loin d’une plage aux sables éternels.
Tout me paraissait grand. Je n’avais aucun doute j’allais vivre en ces lieux des jours heureux !
Quelques marches encore me séparaient de la liberté que je quittais sans le vouloir, mais surtout sans le savoir !
D'ailleurs, ma chère maman aurait, si elle avait su dans quel guêpier elle me conduisait, fait demi tour sur-le-champ, elle qui avait sauvé deux jeunes enfants au nez et à la barbe de la division Dass Reich, célèbre pour ses exactions, en les sortant des rangs de la déportation à Figeac.
Elle n’avait pris ce jour-là qu’un petit risque, celui d’une simple balle dans la tête !
Mais revenons à ma triste aventure !
Un dernier escalier à gravir nous conduisit dans un immense hall où étaient exposés de très beaux meubles. J’ai surtout remarqué un très grand canapé. Face à lui, posée sur une tablette trônait une télévision allumée qui a attiré tout de suite mon attention.
C’était la première fois que j’apercevais cet objet magique où des images s’animaient !
-Tu vas être heureux ici, Maurice…
- oui, maman !
Une gentille dame très bien habillée s’est avancée vers nous.
-Je suppose qu’il s’agit de Maurice, notre futur petit pensionnaire ?
Il a l’air bien mignon, nous allons bien nous occuper de lui !
Ces phrases ont fini par me rassurer et à me convaincre de la nécessité de ce long voyage. Je lâchai la main de ma mère pour la serrer une dernière fois dans mes petits bras.
Est arrivé alors ce moment qui dans ma vie, a marqué pour toujours mon impuissance à retenir les personnes que je j’aime.
Ma mère allait me quitter de longs mois, mais c’était pour mon bien !
On doit bien trouver une raison à une séparation douloureuse quand on est un tout petit bonhomme.
J’étais malade, pourtant je me sentais bien dans mon corps, je venais de passer plus d’un mois dans une clinique où l’on me faisait des transfusions journellement, je ne pouvais être que guéri !
D’ailleurs à la fin de mon hospitalisation je parcourais tous les couloirs en chantant, j’étais connu et apprécié de tous les malades !
Qui ne connaissait pas Maurice ?
La mère de Charles Boyer l’acteur, qui résidait en permanence à la clinique était devenue ma troisième grand-mère, ma confidente. Elle m’invitait à venir voir dans sa chambre les films où son fils jouait et elle était fière de pouvoir le dire: -Regarde…regarde…Maurice ! C’est Charles mon enfant, tu vois comme il est beau !
Il faut croire que dans l’existence les bons moments sont très éphémères, j’allais l’apprendre après ce bref passage au paradis !
La gentille assistante sociale avait tellement insisté que ma maman s’était laissée convaincre!
L’heure n’était plus aux regrets, mais à la séparation. Une main ferme me fit comprendre dans quelle direction je devais aller !
Les larmes envahissaient mes yeux et je suis certain que le regard de ma mère s’était voilé au même instant, elle si rassurante, si aimante, cette femme unique, si belle, si héroïque !
Je suivais Maïté sans le savoir une basque à la voix forte, à la main rugueuse et lourde !
Je descendais au sous-sol du grand et beau bâtiment flambant neuf.
Une porte pleine s’ouvrit donnant sur un espace sans ouverture, où une douzaine de tout petits lits à barreaux étaient alignés.
Des enfants silencieux me fixaient du regard.
-Installe-toi ici, ce sera ton lit, mets tes affaires dans cette armoire !
Puis elle quitta ce que je dois appeler une cave qui sentait le renfermé, bien loin du bon air marin que l’on m’avait promis.
-Salut, le nouveau d’où viens-tu ?
Je m’évertuai à répondre à un flot de questions qui fusaient dans tous les sens, alors que je n’avais qu’une envie, celle de m’isoler pour pleurer.
Mais j’étais un rude je n’allais pas dévoiler mes faiblesses.
Fatigué par ce long déplacement je me couchais enfin sur un petit lit conçu pour un enfant de quatre à six ans, moi qui étais dans ma onzième année !
La position idéale sur cette couche inconfortable était celle du chien de fusil, en prenant soin d’éviter quelques ressorts qui visiblement n’avaient pas résisté à l’épreuve du temps.
Je me suis endormi rapidement et j’ai été réveillé presque aussitôt par une salve de coups de balai qui atterrissaient sur moi un peu dans tous les sens.
Chaque petit lit a eu droit à sa ration, peu de temps après, j’ai entendu des voix fluettes me demander :
-Elle t’a frappé toi aussi le nouveau ?
- Oui…
- il faudra t’y habituer, ce sera comme ça tous les soirs !».
Avant d’aller plus loin dans mon récit je veux vous faire part de la souffrance morale de l’enfant déraciné.
Je n’avais pas à me plaindre, j’étais parmi les grands du centre qui avaient la possibilité de se protéger un peu !
J’ai une pensée émue pour les bébés qui ont vécu cette atrocité sans défense !
Comme nous ils avaient été placés dans la maison du "rachitisme" par rapport à leur corpulence chétive.
Comment a-t’on pu séparer des êtres si fragiles des bras de leur maman ?
Je n’arriverai jamais à me l’expliquer !
Je vous dirai plus tard comment j’ai appris qu’ils étaient prisonniers eux aussi entre ces horribles murs au sous-sol.
Je reviens au tout début de mon long séjour. Ma tristesse était infinie, une seule idée hantait mes pensées et nourrissait une angoisse perpétuelle.
J’aurais souhaité rentrer chez moi immédiatement pour ne pas avoir à souffrir pour retrouver mes parents, mes frères, revoir mes chiens, mes chats ils étaient sûrement eux aussi tristes de ne plus me voir !
Les minutes dans ces conditions sont alors semblables à des heures, les heures à des mois, les mois à des années !
Tout s’écroule, une immense solitude envahit l’esprit, elle ne se domine pas, on ne s’y habitue pas, on la subit.
Mon premier réveil fut cauchemardesque, je ne peux pas vous le décrire, il est gravé en moi comme une plaie qui ne cicatrisera jamais !
Une «maman» basque arriva, c’est ainsi que nous devions les nommer !
Vous savez !…du genre de celles que l’on n’a pas envie de peloter, une rude, une pure, une solide à la main rugueuse rapide comme l’éclair !
La toilette matinale n’existait pas, j’ai un vague souvenir d’une douche commune prise durant la première moitié de mon séjour.
Toujours au sous-sol j’allais prendre mon premier petit déjeuner.
C’était un breuvage amer accompagné de quelques tranches de pain. Ce mélange de liquide en guise de café au lait pouvait favoriser les nausées. Les enfants récemment arrivés avaient du mal à s’y habituer. La cause ne résidait pas dans le fait qu’ils étaient tous difficiles croyez-moi !
-Mange, me lança un de mes camarades, il faut que tu manges !».
Je n’avais pas faim, mon estomac était noué !
Mais il fallait bien que je fasse ce gros effort sur moi, j’ai fini par avaler quelques gorgées.
J’ai vu des «nouveaux» (c’est ainsi que nous les surnommions à la maison du rachitisme) refuser de se nourrir au moins pendant deux jours !
Les plus anciens s’arrangeaient pour que la surveillante ne s’en s’aperçoive pas.
La faim finit toujours par l’emporter et persuade les estomacs les plus délicats!
On nous servait des repas toujours semblables et il n'était pas rare de trouver notre ami préféré le cafard dans une de nos assiettes !
Il ne fallait pas s’en plaindre, c’était, paraît-il, normal !
Ma mère m’a confié qu’elle avait eu la curiosité d’observer, le jour de mon départ, l’enclos aux poubelles. De grosses boites de conserves d’environ cinquante kilogrammes sans étiquette s’y trouvaient.
Un soir on nous a servi une omelette aux lentilles, je dois dire que nous avions rechigné à manger ces dernières à midi !
Aux cuisines on avait l’art d’accommoder les restes n’est-ce pas ?
On s’encourageait, il fallait achever ce que l’on avait dans nos gamelles, c’était devenu une sorte devmission !
Nous étions arrivés dans le but de reprendre du poil de la bête !
Et des bêtes nous étions devenues !
La pire des épreuves gustatives nous attendait en milieu d’après-midi. On nous obligeait à ingurgiter ce qui était sensé être du lait !
Je connaissais bien le bon goût de ce dernier je le buvais par giclées au pis de ma chère Flourette !
Là, seule la couleur blanche pouvait entretenir une mince illusion sur ce nectar précieux.
Une fois en bouche, notre seul recours était d’avaler le breuvage le plus rapidement possible pour éviter les retours aux relents amers et nauséabonds !
Certains enfants se sacrifiaient en buvant celui de leurs camarades qui ne pouvaient absolument pas supporter cette curieuse potion !
Tous les verres devaient être vides à la fin de cette dégustation forcée !
Était-ce une potion à effets secondaires ?
Je ne le saurai jamais !
Ah !…Ne croyez pas que l’on ne se marrait pas de temps en temps !
On ne manquait pas d’idées, le matin on avait quartier libre dans la cave.
Mais ne vous inquiétez pas trop pour nous la malbouffe avait son coté bénéfice : l’esprit n’en est que plus alerte !
Nous avions des idées, pour nous amuser.
Notre jeu favori consistait à capturer les bestioles qui crapahutaient sur le sol.
On avait là une superbe réserve à portée de main.
Les rongeurs se méfiaient de nous, contrairement aux cafards qui sont des bestioles, reconnaissons-le, stupides !
Nous ne leur laissions aucune chance de nous échapper !
On les remuait dans tous les sens avec nos petites menottes que l’on ne lavait jamais.
Eh bien, vous allez peut-être difficilement me croire nous n’étions jamais malades !
Nous avions inventé -du moins le pensait-on la course de cafards, un jeu qui nous occupait et qui nous faisait rire aux éclats !
Vous allez me dire : « Il faut peu de chose pour amuser les gosses » …et c’est très vrai !
Nous organisions des compétitions épiques…non hippiques !
C’est seulement quelques années plus tard en regardant un film culte que la télévision diffusait chaque année ou presque, " Les trois chevaliers du Bengale" que je me suis aperçu que les acteurs prisonniers dans un cachot jouaient avec ces insectes selon les mêmes règles que nous !
Incroyable non ?
On nous amena un jour à l’océan, cela à notre très grande surprise !
Nous avons eu l’autorisation de tremper nos pieds dans l’eau !
Devant nous, un rocher sur la plage était couvert d’escargots de mer. Un copain m’ a dit : « Ils sont bons à manger » Et bien croyez-moi, ils n’ont pas eu le temps de sortir les cornes !
Je vais maintenant vous parler d’une journée bien particulière !
Bien que présents dans ce centre, mes copains de caverne ne me paraissaient pas chétifs !
Je n’ai jamais constaté chez eux le moindre souci pouvant justifier la nécessité de leur présence à Biarritz, on peut-être maigre et en grande forme physique, je l’ai appris plus tard en pratiquant le sport cycliste.
Aujourd’hui je me dis avec beaucoup de recul qu’une organisation malsaine était bien en place en ce début de cinquième République !
Mais cela n’est pas un scoop !
Les enfants de la Réunion ont souffert d’une politique déracinement immonde !
Avec le Ministre de Charles….Michel Debré, c’était de gré ou de force !
À qui profitait le crime ?
Un jour, j’ai eu le malheur d’avoir mal à une dent, vous savez à quel point on souffre dans cette situation !
Comment allais-je faire accepter à la basque à la main rugueuse que mon cas était urgent ?
J’étais un douillet, un simulateur je faisais tout pour me faire plaindre !
Mes braves copains avaient beau me soutenir elle s’en fichait royalement !
Après de longs jours de souffrance elle a décidé enfin d’en toucher un mot à la Direction.
La décision de me conduire chez un dentiste en ville fut enfin prise.
J’allais m’absenter de la cave pour une balade dans la superbe ville balnéaire !
Après avoir décapé très sommairement mon enveloppe charnelle crasseuse j’ai mis ma tenue de sortie.
Madame la Directrice était la très sympathique personne à l’accueil, elle se chargea de mon déplacement chez le praticien son mari.
C’est ce que j’ai appris bien plus tard, notre homme était chirurgien dentiste.
Au volant de sa belle limousine dans le centre de Biarritz, elle grilla un feu rouge.
Un coup de sifflet se fit entendre aussitôt !
Sans se démonter, ni ralentir, elle lança à l’agent : « Je n’ai pas le temps vous nous enverrez la note ! ».
Il me tardait d’arriver chez mon sauveur après tout il y avait urgence !
Je me trouvais allongé confortablement pour une fois! Le dentiste décida de m’extraire la dent malade.
J’ai une dentition relativement bonne encore aujourd’hui, je suppose qu’il devait s’agir d’une dent de lait !
L’avantage c’est qu’elle ne m’a plus jamais fait mal !
Ils parlaient entre eux, et il lui a dit :
-Tu peux m’amener tes pensionnaires, filles ou garçons je suis sûr que je leur trouverai au moins deux ou trois caries !».
C’est à cet instant précis que j’ai réalisé que nous n'étions pas seuls dans le bâtiment.
Comment imaginer qu’après de longs mois, nous n’avions ni croisé ni aperçu d’autres enfants filles ou garçons âgés de deux à douze ans ?
Il n’y avait aucune âme qui vive à part nous les pestiférés !
De retour dans les entrailles de l’immense demeure j’en ai parlé à mes copains de cellule.
« Non !…non !…nous sommes seuls » me répétèrent en chœur mes copains !
On entendait bien quelques cris stridents qui perçaient la froideur de la nuit parfois, mais rien ne nous laissait supposer que des bébés occupaient non loin de nous ce sous-sol lugubre !
Puis, arriva ce jour spécial où la mégère de service nous a dit : «Dépêchez-vous !…On va aller se cacher, il ne faudra pas parler, c’est un jeu, il y aura une récompense à la clé !».
Elle nous conduisit dans une cave encore plus obscure que celle à laquelle nous étions habitués et ferma la porte à clé !
Dans un silence glacial nous sommes restés là, terrés.
Après de longues heures, une personne est venue nous ouvrir !
« C’est bon !…vous pouvez sortir !».
Nous attendons toujours la fameuse récompense !
Enfin si, elle allait faire son apparition sous une forme déguisée !
Quelques semaines avant mon départ, on allait enfin quitter le trou à rats et nos camarades de jeu les cafards.
Nous allions prendre nos quartiers dans un beau dortoir avec de grands lits, tout était magnifique à mes yeux et même confortable !
Nous disposions de grands lits, d’une salle de bain, et surtout les personnes qui s'occupaient de nous étaient gentilles !
Nous avions droit à autant de bisous qu’on le souhaitait le soir avant de nous endormir !
Le réfectoire était grand la nourriture excellente, mais que s’était-il passé ?
J’attribue aujourd’hui ce changement radical à un contrôle officiel le jour de notre isolement forcé dans les profondeurs de la fondation !
Il a très certainement fait prendre conscience à la direction qu’elle devait changer de méthode au risque de se faire épingler par la patrouille !
J’ai été surpris de rencontrer à l’étage supérieur au nôtre des enfants très bien habillés, entourés de nombreux jouets dans des salles superbement décorées !
" Là, tout n'est qu'ordre et beauté,: Luxe, calme et volupté " merci cher Baudelaire !
Ils étaient ce jour-là occupés à jouer à des jeux de société.
Monsieur le Directeur avait une politique sanitaire à deux vitesses !
Les enfants de parents riches vivaient leur séjour au dernier étage de la somptueuse bâtisse !
Les enfants des pauvres descendaient directement au sous-sol !
Financièrement nous étions très rentables pour l’homme d’affaires !
Je vous rappelle que le centre hélio-marin était agréé par le ministère de la santé !
On ne mélangeait pas comme vous le constatez, les pauvres avec les riches chez ces gens là !
Peu importe d’un seul coup de baguette magique on vivait dans un autre monde !
C’était un début de vie au château qui nous tendait enfin les bras à nous les pouilleux !
Nous avions l’autorisation d’écrire à nos parents mais nos lettres étaient lues !
Je me remémore que j’écrivais phonétiquement, j’étais presque illettré alors que je rentrais dans ma douzième année !
J’étais le chouchou d’une maman, elle venait à mes côtés lorsque je faisais la sieste et me couvrait de baisers, m’ont rapporté mes camarades.
Le jour de ma libération est intervenue, hélas, presque aussitôt !
Ces conditions d’existence n’ont malheureusement pas duré très longtemps, d’après ce que j’ai lu sur le forum consacré au centre, avant d’être supprimé !
Décidément, dans cet aérium les mauvaises habitudes étaient tenaces !
Ce que je décris aujourd’hui, c’est ce que j’ai vécu et que je puise au fond de mon subconscient.
Enfin sur le chemin du retour, j’étais heureux à la simple idée de revoir ma maison, mon père, mes frères, mes chiens, mes chats et tous les animaux de la ferme.
Je n’ai jamais dit un mot de mon séjour déplorable à mes parents, j’ai tout fait pour occulter dans ma mémoire ces longs mois de souffrance, pour ne me souvenir que des quelques jours qui ont précédé mon départ !
J’ai fait la connaissance de Danièle et Brigitte, elles m’ont mis au courant de leur calvaire !
Elles avaient à peine plus de deux ans lorsqu’elles ont été séparées de leur famille et prisonnières du centre hélio-marin.
Brigitte a pu se remémorer quelques instants de son triste séjour grâce à l’hypnose.
Danièle est aujourd’hui psychologue, on se contacte de temps en temps au téléphone.
Elle m’a rapporté qu’elle était revenue amaigrie chez elle et que dans le train qui la ramenait, elle répétait en boucle : «pas la dame qui me donne des claques !…Pas la dame qui me donne des claques ! ».
Un bébé d’à peine plus de deux ans n’invente pas ces mots si durs à entendre !
La seule explication que j’ai à vous donner d’après mon analyse, c’est que l’infirmière basque au revers expéditif devait la frapper régulièrement !
J’inscris ses paroles ici en lettres de sang !
«Si tu continues à te plaindre, je te fous une claque ! »…et bien entendu je n’ai aucun doute, elle frappait régulièrement Daniele et les autres petits en bas âge !
Elle devait venir se défouler en bas sur les pauvres petiots incarcérés cette soi-disant infirmière, qualifiée de gentille par les bambins d’en haut !
Danièle a le terrible souvenir, je le précise d’être attachée sur son petit lit !
J’ai pu sauver le témoignage de beaucoup d’enfants qui ont connu cet enfer à deux pas de la mer !
Ils sont très émouvants, à la limite du supportable !
Il faut avoir une certaine volonté croyez-moi, pour écrire sur un sujet qui vous a torturé l’esprit insidieusement en transformant votre petite âme d’enfant !
 
Dernière édition:
Le passage à niveau et la guérite de mon enfance.

À retravailler !

Mon père a exercé un temps le métier de veilleur de nuit qu’il jumelait avec le travail à la ferme.
Je l’accompagnais parfois et j’ai connu les différentes barrières et guérites entre la Madeleine et Cajarc.
Le métier n’était pas reposant, même si à la fin des années cinquante les voitures ne provoquaient pas de bouchon dans le secteur rocailleux de Montbrun où il exerçait sa fonction le plus souvent.
Muni d’une gamelle bien remplie pour l’occasion, réveillon oblige, on passait donc la nuit, dans ce petit abris très sobre, équipé d’un simple bureau d’une chaise et d’un petit poêle à bois, qui n’avait aucun mal à réchauffer l’atmosphère instantanément et à la rendre très agréable pour ne pas dire confortable !
Il faut savoir que le froid dans notre région prenait des allures disproportionnées à cette époque.
En février 1956 la température moyenne a oscillé entre moins quinze et moins vingt huit degrés et cela tout le mois.
Parfois quelques bêtes sauvages affamées venaient déranger cette apparente quiétude pour m’éveiller un moment.
Se faisait entendre alors un fracas de branches piétinées qui dérangeait la nuit, mon père se précipitait alors sur un vieux fusil pour essayer d’éliminer un de ces intrus !
Les hordes de sangliers aux pures souches Quercynoises ne manquaient pas, était-ce une compagnie des chemins de fer français ?
A ma question : «pourquoi papa tu veux tuer ces animaux ? »
il me répondait :
« Ils risquent de faire dérailler un train, et cela va nous permettre de manger pendant un bon moment ! »
Mais revenons à notre petite guérite et parlons du travail de nuit du veilleur.
Les horaires des trains de marchandises étaient inscrits sur un petit carnet, et la barrière à manivelle n’était levée que lorsqu’une voiture se présentait en klaxonnant brièvement.
La nuit était donc relativement calme côté route, cependant le trafic marchandises et ses convois avec des rames pouvant atteindre mille huit cent tonnes d’une longueur de huit cent mètres se succédaient à un rythme infernal !
Mon père était muni de gros pétards qu’il pouvait fixer sur les rails et qui étaient censés arrêter le train en cas de problème majeur.
Il n’était pas rare en effet, que dans le secteur de Toirac à Cajarc, qu’un énorme bloc rocheux dans un bruit d’enfer stoppe le calme serein de la nuit et tombe sur la voie !
Ce système ingénieux par câble reliant toutes les guérîtes les veilleurs de nuit se prévenaient et installaient le dispositif d’arrêt avant que la bête noire ne se présente toute vapeur dehors.
Quelquefois les essieux chauffaient au point de devenir rouge saillants, le garde téléphonait alors à la gare de Cajarc pour signaler le grave problème.
Cela lui permettait au passage si je puis dire, d’arrondir un peu sa fin de mois.
Une prime était versée pour récompenser cet acte de conscience hautement professionnelle.
La nuit me paraissait longue, chaque arrivée du monstre noir dans un grondement sourd provoquait un tremblement de terre de magnitude huit à neuf qui me faisait sursauter !
Heureusement il était précédé par le bruit retentissant de l’énorme cloche au pied du support de la barrière. Ripette le mécanicien à bord de la bête noire ajoutait à cette ambiance harmonieuse un long coup de sifflet strident à la sortie du tunnel.
Je rends grâce à Morphée qui me permettait de me rendormir sur le bureau qui faisait ce jour-là office de couche douillette.
J’étais à nouveau bercé par le calme qui revenait tranquillement et qui contrastait avec le grincement sinistre de ce convoi de ferraille emballé.
Je me souviens d’avoir aidé mon père à relever les immenses bras qui barraient la route munies de manivelles qui me paraissaient tout simplement démesurées.
Inutile de vous dire que j’étais fier de cet exploit !
Ainsi arrivait tranquillement le jour, je ne vous cache pas qu’il me tardait de rentrer à la maison pour retrouver mon lit.
J’avais quand même quelques heures de sommeil à rattraper !
Je me suis par contre toujours demandé, si le garde barrière de Capdenac avait le même salaire que celui de la vallée de la Diège après la mine sur le chemin empierré qui mène à Lieucamp ?
Le premier avait un travail considérable par rapport à l’affluence intense du rail et de la route en direction du centre ville.
L’autre ne voyait passer qu’un tombereau tiré par des bœufs une fois dans un sens, l’autre fois dans l’autre, les jours de grand trafic !
 
Version définitive

Anselme le fossoyeur croque-mort bien connu des gens du pays, et Cyprien notre voisin le mendiant vers la fin des années cinquante.

Ce brave Anselme le fossoyeur fait partie des personnages qui ont marqué de leur empreinte la région qui les a vus naître. Qui ne connaissait pas Anselme? Aussi blanc que la farine du meunier, ou les fidèles clients qu’il transportait jusqu’à leur dernière demeure. Il était d’une maigreur qui ferait pâlir de jalousie tous les mannequins d’aujourd’hui !
Il faut dire qu’il travaillait beaucoup, l’époque que l’on traversait n’était pas avare avec lui, le glas sonnait souvent, un coup signifiait qu’une femme nous avait quitté, deux coups qu’il s’agissait d’un homme.
Notre terrassier muni d’une pelle a passé sa rude vie à faire des trous de toutes les dimensions, contrairement au poinçonneur de la Porte des Lilas.
C’était un brave, comme l’on en rencontre peu, fort en répartie ; d’ailleurs, pour asseoir son statut, il ne manquait pas de mentionner son passage à l’école primaire.
Il se plaisait lorsque mon père croisait sa route funèbre, de lui rappeler qu’il avait bien connu son frère le professeur de lettres et lâchait alors cette phrase forte et sans compromis : «Je suis été à l’école avec ton frère Roger !»
Il ne manquait jamais une occasion de discuter un moment avec le curé du village en le harcelant de : « Putain de moine monsieur le curé!».
Un soir d’été il s’était rendu à Capdenac récupérer un cercueil sur mesure chez le menuisier en prévision de la mort de la pauvre mère Couderc qui avait disait-on dans le coin "perdu la tête!".
Il se doutait bien par rapport à sa grande expérience que le fameux bouillon d’onze heures allait lui être servi prochainement.
C’était un fossoyeur très prévoyant et comme on le dit souvent actuellement, mieux vaut avoir un coup d’avance !
Là, il en avait deux! La dame étant de forte corpulence il avait pris soin de creuser une grande fosse au cimetière !
Elle était fin prête à accueillir la future défunte !
C’était une après-midi où la lourdeur atmosphérique laissait présager une soirée électrique.
Vous savez celle qui vous oblige à marquer un arrêt à tous les troquets que vous trouvez sur votre parcours pour vous désaltérer !
Ce qui devait arriver se arriva ! Alors qu’il était à mi-chemin sur le retour vers le clocher de l’église, il fut confronté à un violent orage qui le plongea en un instant dans un milieu sombre aux ombres lugubres !
Sa vieille jument grise Coquette connaissait la côte de Roquefort sur le bout de ses sabots, des déluges elle en avait essuyés bien d’autres et sûrement des pires!
Au fil des années, elle avait fini par enregistrer les habitudes d’Anselme et, rapporte t-on au pays, elle s’arrêtait en face de tous les bistrots de la région sans que son maître éprouve l’utilité de lui en donner l’ordre.
Patiente comme les morts qu’elle transportait elle attendait que son cocher se soit bien désaltéré.
Brave dans l’âme, notre croque-mort avait toujours dans la réserve de la charrette un seau d’eau pour sa Coquette monture.
Il n’y avait pas à se préoccuper du taux d’alcoolémie à l’époque ni de la vitesse excessive, l’attelage pouvait ainsi lanterner sereinement, même si son conducteur était ivre mort.
Mais revenons là où nous avions laissé Anselme ! Quand on fait face aux éléments qui se déchaînent, il faut réagir vite, surtout sous une pluie battante éclairée seulement par les flèches que lançait le diable !
Il décida de profiter d’un abri providentiel et se glissa dans le cercueil.
Il ne tarda pas à s’endormir la journée avait été arrosée elle aussi, comme je viens de vous l’expliquer !
Ce convoi exceptionnel s’il en est continuait sa route sereinement malgré les éléments quand soudain une salve de coups de klaxons à réveiller un mort couvrit le grondement du tonnerre !
Notre homme sursauta dans la boîte se cognant au passage au couvercle qu’il soulevait d’une main tout en se frottant la tête de l’autre, hurlant sa douleur au grand air, blanc comme un linceul !
Nos automobilistes voyant ce cadavre fantomatique ébloui par les phares de leur voiture se ranimer sous leurs yeux, furent pris d’une frayeur soudaine et après un demi-tour digne des meilleurs films d’action hollywoodiens prirent la fuite !
Anselme, lui, n’a jamais su expliquer le comportement bizarre et surtout indigne de ces personnes étrangères à la région en manque total d’éducation.
Ce brave courageux est mort au cimetière du Mas du Noyer occupé à creuser une fosse pour son prochain client.
Le jour de son enterrement tout le village suivit le corbillard tiré par la brave Coquette , et rien ne semblait avoir changé !
Anselme était derrière et elle, devant !
Un deuxième pauvre gravitait dans la région il connaissait les lieux comme sa poche trouée, couvert de haillons. Je ne lui ai jamais connu une autre tenue, il la portait même pour les obsèques de sa pauvre femme "la Virgile".
Il vivait de misère avec son amour dans une vielle bâtisse au fond d’une grange, où seul un morceau de toit qu’il entretenait annuellement les abritait des intempéries.
Cyprien passait régulièrement nous proposer des escargots, des châtaignes, et un tubercule prisé par les riches aujourd’hui, que l’on nomme la truffe.
Bien que presque aveugle, Il n’avait pas son pareil pour trouver l’or noir du Quercy ce pauvre hère!
Nous étions ses amis il venait à la maison pour troquer sa marchandise, et il repartait avec quelques sous après avoir partagé une bonne soupe campagnarde.
Ma grand-mère mère qui était une excellente cuisinière l’invitait souvent à déguster des mets dont elle avait le secret. Au menu elle servait des plats régionaux, escargots à l’oseille, truffes fraîchement cueillies.
Tiens, à ce propos voici une recette très facile à réaliser je vous en dévoile aujourd’hui les ingrédients. Elle était d’ailleurs mentionnée dans un ancien livre de cuisine du début du siècle dernier !
Vous prenez un kilogramme de truffes du Quercy, vous les coupez en très fines tranches, vous assaisonnez légèrement avec de l’huile du vinaigre et une pincée de poivre, vous dégustez, c’est excellent !
Ainsi les pauvres d’avant pouvaient-ils se régaler avec des assiettes aujourd’hui réservées aux riches. Un kilogramme de truffes se négocie actuellement sur le marcher de Lalbenque entre huit cents et mille deux cents euros.
Revenons à notre brave homme. Un jour les pompiers sont venus le prévenir d’un drame qui venait de se produire au passage à niveau de la Madeleine.
Sa pauvre aimée la Virgile sourde comme un pot avait été la malheureuse victime d’une satanée bête noire et ce jour-là pourtant un train n’en cachait pas un autre !
Notre brave Cyprien en devinant les restes éparpillés de sa chère épouse a eu cette phrase mémorable qui en disait long sur leur vie amoureuse !…En patois traduit....
« Milladiou…Aqueste cop ela comprès »!.
« Ce coup ci elle a compris !»
 

Pièces jointes

Version définitive

C16C3049-9184-4412-904B-E89D67A51AFD.jpeg Anselme le fossoyeur croque-mort bien connu des gens du pays, et Cyprien notre voisin le mendiant vers la fin des années cinquante.

Ce brave Anselme le fossoyeur fait partie des personnages qui ont marqué de leur empreinte la région qui les a vus naître. Qui ne connaissait pas Anselme? Aussi blanc que la farine du meunier, ou les fidèles clients qu’il transportait jusqu’à leur dernière demeure. Il était d’une maigreur qui ferait pâlir de jalousie tous les mannequins d’aujourd’hui !
Il faut dire qu’il travaillait beaucoup, l’époque que l’on traversait n’était pas avare avec lui, le glas sonnait souvent, un coup signifiait qu’une femme nous avait quitté, deux coups qu’il s’agissait d’un homme.
Notre terrassier muni d’une pelle a passé sa rude vie à faire des trous de toutes les dimensions, contrairement au poinçonneur de la Porte des Lilas.
C’était un brave, comme l’on en rencontre peu, fort en répartie ; d’ailleurs, pour asseoir son statut, il ne manquait pas de mentionner son passage à l’école primaire.
Il se plaisait lorsque mon père croisait sa route funèbre, de lui rappeler qu’il avait bien connu son frère le professeur de lettres et lâchait alors cette phrase forte et sans compromis : «Je suis été à l’école avec ton frère Roger !»
Il ne manquait jamais une occasion de discuter un moment avec le curé du village en le harcelant de : « Putain de moine monsieur le curé!».
Un soir d’été il s’était rendu à Capdenac récupérer un cercueil sur mesure chez le menuisier en prévision de la mort de la pauvre mère Couderc qui avait disait-on dans le coin "perdu la tête!".
Il se doutait bien par rapport à sa grande expérience que le fameux bouillon d’onze heures allait lui être servi prochainement.
C’était un fossoyeur très prévoyant et comme on le dit souvent actuellement, mieux vaut avoir un coup d’avance !
Là, il en avait deux! La dame étant de forte corpulence il avait pris soin de creuser une grande fosse au cimetière !
Elle était fin prête à accueillir la future défunte !
C’était une après-midi où la lourdeur atmosphérique laissait présager une soirée électrique.
Vous savez celle qui vous oblige à marquer un arrêt à tous les troquets que vous trouvez sur votre parcours pour vous désaltérer !
Ce qui devait arriver se arriva ! Alors qu’il était à mi-chemin sur le retour vers le clocher de l’église, il fut confronté à un violent orage qui le plongea en un instant dans un milieu sombre aux ombres lugubres !
Sa vieille jument grise Coquette connaissait la côte de Roquefort sur le bout de ses sabots, des déluges elle en avait essuyés bien d’autres et sûrement des pires!
Au fil des années, elle avait fini par enregistrer les habitudes d’Anselme et, rapporte t-on au pays, elle s’arrêtait en face de tous les bistrots de la région sans que son maître éprouve l’utilité de lui en donner l’ordre.
Patiente comme les morts qu’elle transportait elle attendait que son cocher se soit bien désaltéré.
Brave dans l’âme, notre croque-mort avait toujours dans la réserve de la charrette un seau d’eau pour sa Coquette monture.
Il n’y avait pas à se préoccuper du taux d’alcoolémie à l’époque ni de la vitesse excessive, l’attelage pouvait ainsi lanterner sereinement, même si son conducteur était ivre mort.
Mais revenons là où nous avions laissé Anselme ! Quand on fait face aux éléments qui se déchaînent, il faut réagir vite, surtout sous une pluie battante éclairée seulement par les flèches que lançait le diable !
Il décida de profiter d’un abri providentiel et se glissa dans le cercueil.
Il ne tarda pas à s’endormir la journée avait été arrosée elle aussi, comme je viens de vous l’expliquer !
Ce convoi exceptionnel s’il en est continuait sa route sereinement malgré les éléments quand soudain une salve de coups de klaxons à réveiller un mort couvrit le grondement du tonnerre !
Notre homme sursauta dans la boîte se cognant au passage au couvercle qu’il soulevait d’une main tout en se frottant la tête de l’autre, hurlant sa douleur au grand air, blanc comme un linceul !
Nos automobilistes voyant ce cadavre fantomatique ébloui par les phares de leur voiture se ranimer sous leurs yeux, furent pris d’une frayeur soudaine et après un demi-tour digne des meilleurs films d’action hollywoodiens prirent la fuite !
Anselme, lui, n’a jamais su expliquer le comportement bizarre et surtout indigne de ces personnes étrangères à la région en manque total d’éducation.
Ce brave courageux est mort au cimetière du Mas du Noyer occupé à creuser une fosse pour son prochain client.
Le jour de son enterrement tout le village suivit le corbillard tiré par la brave Coquette , et rien ne semblait avoir changé !
Anselme était derrière et elle, devant !
Un deuxième pauvre gravitait dans la région il connaissait les lieux comme sa poche trouée, couvert de haillons. Je ne lui ai jamais connu une autre tenue, il la portait même pour les obsèques de sa pauvre femme "la Virgile".
Il vivait de misère avec son amour dans une vielle bâtisse au fond d’une grange, où seul un morceau de toit qu’il entretenait annuellement les abritait des intempéries.
Cyprien passait régulièrement nous proposer des escargots, des châtaignes, et un tubercule prisé par les riches aujourd’hui, que l’on nomme la truffe.
Bien que presque aveugle, Il n’avait pas son pareil pour trouver l’or noir du Quercy ce pauvre hère!
Nous étions ses amis il venait à la maison pour troquer sa marchandise, et il repartait avec quelques sous après avoir partagé une bonne soupe campagnarde.
Ma grand-mère mère qui était une excellente cuisinière l’invitait souvent à déguster des mets dont elle avait le secret. Au menu elle servait des plats régionaux, escargots à l’oseille, truffes fraîchement cueillies.
Tiens, à ce propos voici une recette très facile à réaliser je vous en dévoile aujourd’hui les ingrédients. Elle était d’ailleurs mentionnée dans un ancien livre de cuisine du début du siècle dernier !
Vous prenez un kilogramme de truffes du Quercy, vous les coupez en très fines tranches, vous assaisonnez légèrement avec de l’huile du vinaigre et une pincée de poivre, vous dégustez, c’est excellent !
Ainsi les pauvres d’avant pouvaient-ils se régaler avec des assiettes aujourd’hui réservées aux riches. Un kilogramme de truffes se négocie actuellement sur le marcher de Lalbenque entre huit cents et mille deux cents euros.
Revenons à notre brave homme. Un jour les pompiers sont venus le prévenir d’un drame qui venait de se produire au passage à niveau de la Madeleine.
Sa pauvre aimée la Virgile sourde comme un pot avait été la malheureuse victime d’une satanée bête noire et ce jour-là pourtant un train n’en cachait pas un autre !
Notre brave Cyprien en devinant les restes éparpillés de sa chère épouse a eu cette phrase mémorable qui en disait long sur leur vie amoureuse !…En patois traduit....
« Milladiou…Aqueste cop ela comprès »!.
« Ce coup ci elle a compris !»