Pour ne pas rester anonymes
Dans l'abyssale éternité
Des hommes commettent des crimes
Sans faire la chose à moitié
Certains tuent un roi, une reine
Ou bien dépècent père et mère
D'autres tuent des gens par dizaines
Et les voilà au dictionnaire
Mais il est des tueurs d'autre espèce
Indifférents à l'avenir
Qui tuent avec délicatesse
Presque par amour, par plaisir
Et leurs noms sont aussi célèbres
Que les tueurs cités ci-dessus
Mais pour moi, pas un de ces zèbres
N'avait le talent de Landru
Henri-Désiré, je suppose
Était un enfant désiré
Car j'en devine un peu la cause
C'était un garçon, le premier
Julien Alexandre Sylvain
Sont les prénoms du paternel
Et Flore est le prénom divin
De la mère, née Henriquel
Les Landru habitent Paris
Rue Puebla, dans le dix-neuvième
C'est là que naît l'enfant chéri
Dans un genre de HLM
Sous la Troisième République
La tribu quitte le quartier
Et loue un logis idyllique
En pleine île de la Cité
Désiré fréquente l'école
Des Frères, rue Bretonvilliers
Ses parents même le cajolent
Pour en faire un jour un curé
Mais le gamin, lui se délecte
D'algèbre et racines carrées
Il voudrait être un architecte
Mais n'en a les capacités
Pour séduire une jeune fille
Il prétend être un intello
Il en obtient la peccadille
Un mariage et un marmot
De vingt-quatre à trente et un ans
Il change vingt fois de métiers
La naissance de quatre enfants
Met le couple en difficulté
Aussi pour toucher le pactole
Landru lance une souscription
Sur des bicycles à pétroles
Sortis de son imagination
Il touche une importante somme
Sous une identité d'emprunt
Déclenchant une chasse à l'homme
Qui bien sûr ne conduit à rien
Il poursuit ses escroqueries
Dissimulé sous de faux noms
Mais un jour la gendarmerie
L'arrête et l'envoie en prison
En mil neuf cent sept, il est libre
Et change son fusil d'épaule
Touchant la romantique fibre
Il entre dans un jeu de rôle
Après de fausses fiançailles
Avec une sotte, bien vraie
Landru prend la dot et se taille
Et jamais ne réapparaît
Mais la police le rattrape
Et l'emprisonne pour trois ans
Mais le barbu garde le cap
Car il manque encore d'argent
Bien vite il achète un garage
Qu'il revend immédiatement
Sans avoir donné un seul gage
Au propriétaire d'avant
Il est repéré assez vite
Mais la justice ne l'empoigne
Car notre escroc a pris la fuite
Sachant qu'il mérite le bagne
Pour s'octroyer des revenus
Il se fait beau comme un sous neuf
Courtisant quelques ingénues
Qui voient en lui un charmant veuf
Il les convie à un séjour
Dans une villa isolée
Qu'il a loué pour quelques jours.
À Chantilly, à Vernouillet
En cette fin des Années folles
Débute une guerre insensée
Les jeunes veuves se consolent
Dans le lit des bourgeois aisés
Jeanne Cuchet, une lingère
Une esseulée de trente-huit ans
Séduite par notre compère
Se fait voler tout son argent
Quand bientôt Jeanne le retrouve
Landru s'excuse en larmoyant
Et face au chagrin qu'il éprouve
Avec son fils de dix-sept ans
Elle s'installe à la campagne
Chez le barbu hospitalier
Lors, les deux naïfs sous sa poigne
Disparaissent à tout jamais
Il fait disparaître leur corps
Dans le fourneau de la villa
Puis rentre à Paris à l'aurore
Et redevient un bon bourgeois
Deux fois encore il récidive
Dans sa maison de Vernouillet
Mais, devant l'odeur excessive
Il va s'installer à Gambais
Gambais, tout près d'Aubergenville
Là, Landru loue une maison
Sur une butte assez tranquille
Ventilée en toutes saisons
Il s'y rend en chemin de fer
Avec ses victimes du jour
Où il est seul dans cette affaire
À s'offrir un aller-retour
Tandis qu'au front partent se battre
Les pères, les fils, les amants
Landru demeure près de l'âtre
À faire cuire les mamans
Quand il retrouve sa famille
Il apporte toujours des fleurs
De l'argent, de la pacotille
Normal, on le croit brocanteur
À l'hiver mil neuf cent dix-huit
Monsieur le maire de Gambais
Reçoit des lettres insolites
Concernant ses administrés
Cinq ou six couples inconnus
Depuis un bout de temps déjà
Résideraient à leur insu
À Gambais sous le même toit
Il apparaît, après enquête
Qu'il s'agit d'un même occupant
Un monsieur Landru en goguette
Marié, père de quatre enfants
Et ses invisibles compagnes
N'auront fait qu'un bien court séjour
En cet endroit, comme en témoignent
Leurs os retrouvés dans le four
Confondu l'escroc séducteur
Avouera avoir contacté
Deux cent quatre-vingts jolis cœurs
Dont seuls onze furent brisés
Le procès de ce misérable
S'ouvre en novembre vingt et un
Une foule considérable
Veut voir de près cet assassin
L'aristocratie, les artistes
Mistinguett, Colette, Raimu
Viennent écouter en touristes
Les insolences de Landru
Dans ses réparties drolatiques
On sent qu'il n'a aucun remord
Et c'est en parfaite logique
Qu'on requiert la peine de mort
Condamné à la guillotine
Son recours étant rejeté
Quand bientôt sonnent les matines
Et qu'on vient pour le réveiller
Quand le curé [pince-sans-rire ?]
Lui dit : "Croyez-vous au prophète ?"
Landru répond : "Je vais mourir
Et vous, vous jouez aux devinettes !"
Un verre de rhum, il repousse
"Car c'est mauvais pour la santé"
"Partir dans les bras d'une rousse"
Est sa dernière volonté
À son avocat qui l'exhorte
D'avouer avant le grand voyage
Il lui répond d'une voix forte
"Cela, c'est mon petit bagage"
À six heures, par un temps clair
Le vingt-cinq février vingt-deux
Le sieur Anatole Deibler
Décapite le présomptueux
Dans l'abyssale éternité
Des hommes commettent des crimes
Sans faire la chose à moitié
Certains tuent un roi, une reine
Ou bien dépècent père et mère
D'autres tuent des gens par dizaines
Et les voilà au dictionnaire
Mais il est des tueurs d'autre espèce
Indifférents à l'avenir
Qui tuent avec délicatesse
Presque par amour, par plaisir
Et leurs noms sont aussi célèbres
Que les tueurs cités ci-dessus
Mais pour moi, pas un de ces zèbres
N'avait le talent de Landru
Henri-Désiré, je suppose
Était un enfant désiré
Car j'en devine un peu la cause
C'était un garçon, le premier
Julien Alexandre Sylvain
Sont les prénoms du paternel
Et Flore est le prénom divin
De la mère, née Henriquel
Les Landru habitent Paris
Rue Puebla, dans le dix-neuvième
C'est là que naît l'enfant chéri
Dans un genre de HLM
Sous la Troisième République
La tribu quitte le quartier
Et loue un logis idyllique
En pleine île de la Cité
Désiré fréquente l'école
Des Frères, rue Bretonvilliers
Ses parents même le cajolent
Pour en faire un jour un curé
Mais le gamin, lui se délecte
D'algèbre et racines carrées
Il voudrait être un architecte
Mais n'en a les capacités
Pour séduire une jeune fille
Il prétend être un intello
Il en obtient la peccadille
Un mariage et un marmot
De vingt-quatre à trente et un ans
Il change vingt fois de métiers
La naissance de quatre enfants
Met le couple en difficulté
Aussi pour toucher le pactole
Landru lance une souscription
Sur des bicycles à pétroles
Sortis de son imagination
Il touche une importante somme
Sous une identité d'emprunt
Déclenchant une chasse à l'homme
Qui bien sûr ne conduit à rien
Il poursuit ses escroqueries
Dissimulé sous de faux noms
Mais un jour la gendarmerie
L'arrête et l'envoie en prison
En mil neuf cent sept, il est libre
Et change son fusil d'épaule
Touchant la romantique fibre
Il entre dans un jeu de rôle
Après de fausses fiançailles
Avec une sotte, bien vraie
Landru prend la dot et se taille
Et jamais ne réapparaît
Mais la police le rattrape
Et l'emprisonne pour trois ans
Mais le barbu garde le cap
Car il manque encore d'argent
Bien vite il achète un garage
Qu'il revend immédiatement
Sans avoir donné un seul gage
Au propriétaire d'avant
Il est repéré assez vite
Mais la justice ne l'empoigne
Car notre escroc a pris la fuite
Sachant qu'il mérite le bagne
Pour s'octroyer des revenus
Il se fait beau comme un sous neuf
Courtisant quelques ingénues
Qui voient en lui un charmant veuf
Il les convie à un séjour
Dans une villa isolée
Qu'il a loué pour quelques jours.
À Chantilly, à Vernouillet
En cette fin des Années folles
Débute une guerre insensée
Les jeunes veuves se consolent
Dans le lit des bourgeois aisés
Jeanne Cuchet, une lingère
Une esseulée de trente-huit ans
Séduite par notre compère
Se fait voler tout son argent
Quand bientôt Jeanne le retrouve
Landru s'excuse en larmoyant
Et face au chagrin qu'il éprouve
Avec son fils de dix-sept ans
Elle s'installe à la campagne
Chez le barbu hospitalier
Lors, les deux naïfs sous sa poigne
Disparaissent à tout jamais
Il fait disparaître leur corps
Dans le fourneau de la villa
Puis rentre à Paris à l'aurore
Et redevient un bon bourgeois
Deux fois encore il récidive
Dans sa maison de Vernouillet
Mais, devant l'odeur excessive
Il va s'installer à Gambais
Gambais, tout près d'Aubergenville
Là, Landru loue une maison
Sur une butte assez tranquille
Ventilée en toutes saisons
Il s'y rend en chemin de fer
Avec ses victimes du jour
Où il est seul dans cette affaire
À s'offrir un aller-retour
Tandis qu'au front partent se battre
Les pères, les fils, les amants
Landru demeure près de l'âtre
À faire cuire les mamans
Quand il retrouve sa famille
Il apporte toujours des fleurs
De l'argent, de la pacotille
Normal, on le croit brocanteur
À l'hiver mil neuf cent dix-huit
Monsieur le maire de Gambais
Reçoit des lettres insolites
Concernant ses administrés
Cinq ou six couples inconnus
Depuis un bout de temps déjà
Résideraient à leur insu
À Gambais sous le même toit
Il apparaît, après enquête
Qu'il s'agit d'un même occupant
Un monsieur Landru en goguette
Marié, père de quatre enfants
Et ses invisibles compagnes
N'auront fait qu'un bien court séjour
En cet endroit, comme en témoignent
Leurs os retrouvés dans le four
Confondu l'escroc séducteur
Avouera avoir contacté
Deux cent quatre-vingts jolis cœurs
Dont seuls onze furent brisés
Le procès de ce misérable
S'ouvre en novembre vingt et un
Une foule considérable
Veut voir de près cet assassin
L'aristocratie, les artistes
Mistinguett, Colette, Raimu
Viennent écouter en touristes
Les insolences de Landru
Dans ses réparties drolatiques
On sent qu'il n'a aucun remord
Et c'est en parfaite logique
Qu'on requiert la peine de mort
Condamné à la guillotine
Son recours étant rejeté
Quand bientôt sonnent les matines
Et qu'on vient pour le réveiller
Quand le curé [pince-sans-rire ?]
Lui dit : "Croyez-vous au prophète ?"
Landru répond : "Je vais mourir
Et vous, vous jouez aux devinettes !"
Un verre de rhum, il repousse
"Car c'est mauvais pour la santé"
"Partir dans les bras d'une rousse"
Est sa dernière volonté
À son avocat qui l'exhorte
D'avouer avant le grand voyage
Il lui répond d'une voix forte
"Cela, c'est mon petit bagage"
À six heures, par un temps clair
Le vingt-cinq février vingt-deux
Le sieur Anatole Deibler
Décapite le présomptueux