La Fuite
Grand Erg Occidental que nous longeons à deux,
Le soleil zénithal éclabousse son feu.
Méharistes sans ombres, nous baignons dans le blanc
De ce sable sans nombre où s’épuise le temps.
Nous poussons devant nous d’agiles fouette-queues
Qui laissent en remous des tracés sinueux.
Et puis la palmeraie se découvre à nos yeux,
Striées de ces murets qui nous semblent si vieux.
Nous laissons nos deux bêtes aux mains d’un touareg
Et d’un assistant sec qui nous semble un peu bègue.
Une fois baraqués, genoux ligaturés,
Les animaux dressés cessent de blatérer.
Ô belle enturbannée habillée comme un homme,
Meimouna, mon aimée, avare de paroles
Pour que rien ne révèle ce que cachent les pans
De l’ample sarouel et de ton burnous blanc,
Depuis ces douze jours que dure notre fuite,
Dans cet immense four sans aucun autre gîte
Que des flancs les entours de nos grands dromadaires,
Je crois que notre amour a l’âge de la Terre.
Ton nom est le parfum de cette prophétie,
Comme un goût de jardin enclos à Ein Gedi ;
Tes joues noires m’enseignent ce qu’est le soleil :
Étrange cœur qui saigne des rayons vermeils.
Tes yeux sont la flamme éclairant les contours
De cette enfant de Cham à qui je fis la cour.
Tu es cette lueur que cachait le treillis
Ausculté dans l’ardeur avant d’être cueillie.
Mais nous pressons le pas pour bientôt arriver
À cette maison basse où la porte à rivets
S’ouvre sur une entrée assourdie de tapis,
De tentures tirées et de meubles épais.
Les armes accrochées − poignards et longs fusils −
La gazelle empaillée et le guépard occis,
Ne gâtent pas le thé bouillant qui est servi
Et sait désaltérer notre amour accueilli.
Le rire plisse tes lèvres sur l’incarnat
De gencives foncées que j’aime, Meimouna,
Tout autant que la grâce de ton cou perlé
Où se mêle l’éclat du cuivre martelé.
Je tends vers toi la main où tu glisses ton front :
Aujourd’hui et demain, jamais nous ne devrons
Plus cacher nos amours, ne connaître de l’heure
Que celle des départs pour n’être découverts.
Aubépin des Ardrets, Béni Abbès
Grand Erg Occidental que nous longeons à deux,
Le soleil zénithal éclabousse son feu.
Méharistes sans ombres, nous baignons dans le blanc
De ce sable sans nombre où s’épuise le temps.
Nous poussons devant nous d’agiles fouette-queues
Qui laissent en remous des tracés sinueux.
Et puis la palmeraie se découvre à nos yeux,
Striées de ces murets qui nous semblent si vieux.
Nous laissons nos deux bêtes aux mains d’un touareg
Et d’un assistant sec qui nous semble un peu bègue.
Une fois baraqués, genoux ligaturés,
Les animaux dressés cessent de blatérer.
Ô belle enturbannée habillée comme un homme,
Meimouna, mon aimée, avare de paroles
Pour que rien ne révèle ce que cachent les pans
De l’ample sarouel et de ton burnous blanc,
Depuis ces douze jours que dure notre fuite,
Dans cet immense four sans aucun autre gîte
Que des flancs les entours de nos grands dromadaires,
Je crois que notre amour a l’âge de la Terre.
Ton nom est le parfum de cette prophétie,
Comme un goût de jardin enclos à Ein Gedi ;
Tes joues noires m’enseignent ce qu’est le soleil :
Étrange cœur qui saigne des rayons vermeils.
Tes yeux sont la flamme éclairant les contours
De cette enfant de Cham à qui je fis la cour.
Tu es cette lueur que cachait le treillis
Ausculté dans l’ardeur avant d’être cueillie.
Mais nous pressons le pas pour bientôt arriver
À cette maison basse où la porte à rivets
S’ouvre sur une entrée assourdie de tapis,
De tentures tirées et de meubles épais.
Les armes accrochées − poignards et longs fusils −
La gazelle empaillée et le guépard occis,
Ne gâtent pas le thé bouillant qui est servi
Et sait désaltérer notre amour accueilli.
Le rire plisse tes lèvres sur l’incarnat
De gencives foncées que j’aime, Meimouna,
Tout autant que la grâce de ton cou perlé
Où se mêle l’éclat du cuivre martelé.
Je tends vers toi la main où tu glisses ton front :
Aujourd’hui et demain, jamais nous ne devrons
Plus cacher nos amours, ne connaître de l’heure
Que celle des départs pour n’être découverts.
Aubépin des Ardrets, Béni Abbès
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