Greu !
(cantilène à l’oncle autiste)
Dans la grande maison du début du vingtième,
Tes déambulations étaient comme une antienne :
Armé de castagnettes et coiffé d’un bonnet,
Espadrilles alertes, tu dansais à l’année.
Paso doble, boléros, fandangos ou coplas,
Passionné de Zorro ainsi que de Ruy Blas,
Ton esprit feu follet ne cessait d’étonner,
Autant que tes « Olé ! » qui étaient coutumiers.
Très grand féru de dates, tu nous les égrenais :
Celles du peuple Chattes et du « bon roi René »,
De Septime Sévère, de Blanche de Castille,
Et des anniversaires de toute la famille.
Tu adorais donner des surnoms de ton cru :
Souvent tu ronronnais, et puis tu criais : « Greu ! »
- « C'est mon nom », soufflais-tu, « c’est çui des énervés » -,
Y avait « P’tit toutou », pour un frère officier ;
« Nestange » - Bonne Maman - prononcé tendrement,
En te tenant les mains, et en les yeux baissant ;
« La Guêpe ! », pour Bon Papa, sur un air de dédain,
Mais en regard narquois, amusé, enfantin.
Et d’ailleurs, les enfants, les plus jeunes surtout,
Allaient en s’amusant et te suivaient partout,
Et tu étais heureux, et tes yeux s’allumaient
À nous rendre peureux de te voir écumer.
Je revois tes dessins, de préférence au Bic,
Du bleu comme un essaim, pour quelque basilique,
De grands clochers ouverts et des traits magistraux,
Du rouge et puis du vert, pour faire les vitraux.
Du rouge et puis du vert, et puis du bleu aussi,
Tout comme dans le verre les nombreuses pastilles
Qui te rendaient vitreux et puis l’air imbécile,
Qui t’avilissaient mieux, car c’était plus facile.
Alors tu parcourais le grand parc arboré,
Tout en laissant traîner tes mains sur les murets ;
Ta face s’éclairait et puis tu maugréais ;
De nouveau tu errais en paroles grêlées.
Aujourd’hui que les pans de ton large chandail,
Et ta toque astrakan, et ta phobie des rails,
Me reviennent en danse avec d’autres détails,
En secret je te lance mon surnom : « ***** ! »
Aubépin des Ardrets
__________
Pour découvrir une partie de l’univers musical de cet oncle, cliquez ICI.
(cantilène à l’oncle autiste)
Dans la grande maison du début du vingtième,
Tes déambulations étaient comme une antienne :
Armé de castagnettes et coiffé d’un bonnet,
Espadrilles alertes, tu dansais à l’année.
Paso doble, boléros, fandangos ou coplas,
Passionné de Zorro ainsi que de Ruy Blas,
Ton esprit feu follet ne cessait d’étonner,
Autant que tes « Olé ! » qui étaient coutumiers.
Très grand féru de dates, tu nous les égrenais :
Celles du peuple Chattes et du « bon roi René »,
De Septime Sévère, de Blanche de Castille,
Et des anniversaires de toute la famille.
Tu adorais donner des surnoms de ton cru :
Souvent tu ronronnais, et puis tu criais : « Greu ! »
- « C'est mon nom », soufflais-tu, « c’est çui des énervés » -,
Y avait « P’tit toutou », pour un frère officier ;
« Nestange » - Bonne Maman - prononcé tendrement,
En te tenant les mains, et en les yeux baissant ;
« La Guêpe ! », pour Bon Papa, sur un air de dédain,
Mais en regard narquois, amusé, enfantin.
Et d’ailleurs, les enfants, les plus jeunes surtout,
Allaient en s’amusant et te suivaient partout,
Et tu étais heureux, et tes yeux s’allumaient
À nous rendre peureux de te voir écumer.
Je revois tes dessins, de préférence au Bic,
Du bleu comme un essaim, pour quelque basilique,
De grands clochers ouverts et des traits magistraux,
Du rouge et puis du vert, pour faire les vitraux.
Du rouge et puis du vert, et puis du bleu aussi,
Tout comme dans le verre les nombreuses pastilles
Qui te rendaient vitreux et puis l’air imbécile,
Qui t’avilissaient mieux, car c’était plus facile.
Alors tu parcourais le grand parc arboré,
Tout en laissant traîner tes mains sur les murets ;
Ta face s’éclairait et puis tu maugréais ;
De nouveau tu errais en paroles grêlées.
Aujourd’hui que les pans de ton large chandail,
Et ta toque astrakan, et ta phobie des rails,
Me reviennent en danse avec d’autres détails,
En secret je te lance mon surnom : « ***** ! »
Aubépin des Ardrets
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